Position américaine sur le Sahara: l’analyse d’une experte basée à New York
En confirmant qu’il n’y a « aucun changement » dans la position américaine concernant la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, l’administration du président Joe Biden, vient de consacrer, de manière on ne peut plus claire, la continuité de la ligne politique des Etats-Unis sur ce dossier clé pour son allié stratégique, contribuant ainsi au tournant majeur en vue du dénouement de ce conflit artificiel.
« Cela demeure la position de l’administration » Biden, a tranché jeudi le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price lors de son point de presse.
Price répondait à un journaliste qui faisait référence à la déclaration du principal conseiller du président américain Joe Biden pour le Moyen-Orient, Brett McGurk, rapportée par le site américain Axios, qui « a confirmé que l’administration Biden ne prévoit pas de revenir sur la mesure prise par Trump concernant le Sahara ».
« Il n’y a pas de changement » sur cette question, telle est la réponse ferme et sans détour de la diplomatie américaine, dans une claire continuité de la position de Washington sur la souveraineté pleine et entière du Maroc sur son Sahara, consignée en décembre dernier dans une Proclamation présidentielle, distribuée ensuite aux 193 Etats membres des Nations-Unies, en tant que document officiel du Conseil de sécurité.
Pour l’analyste et avocate des droits de l’homme et de la sécurité nationale, Irina Tsukerman, cette continuité consacre « les liens historiques naturels qui cimentent les relations entre le Maroc et les États-Unis », en rappelant le rôle clé du Royaume dans la paix et la stabilité en Afrique du Nord et dans le processus de paix au Proche Orient.
« L’administration Biden n’a jamais rejeté la souveraineté du Maroc sur le Sahara », a rappelé, dans une déclaration à la MAP, l’experte basée à New York, pour laquelle il s’est « écoulé suffisamment de temps depuis que le président Biden a pris ses fonctions pour que l’administration ne se soucie plus de voir des politiques importantes directement associées à l’administration précédente », en référence à la rivalité politique traditionnelle, aujourd’hui encore plus accentuée, entre les partis républicain et démocrate.
« En outre, il convient de noter que l’administration est allée plus loin que simplement souligner son soutien (à la marocanité du Sahara), mais a également contacté de manière proactive » le Maroc pour « encourager le renforcement des relations avec Israël » dans un clair soutien aux Accords d’Abraham conclus sous l’ancienne administration du président Donald Trump.
« Les États-Unis cherchent un partenaire régional local capable de gérer les questions diplomatiques et de sécurité relatives à la zone », a-t-elle enchaîné, indiquant que l’administration Biden reconnaît « le rôle du Maroc dans la région » aussi bien aux plans diplomatique, sécuritaire qu’économique.
« Il reste à voir quelles mesures positives, le cas échéant, l’administration Biden entreprendra pour cimenter et justifier cette décision bienvenue », a poursuivi Tsukerman citant « l’accélération de l’ouverture du siège du Consulat américain à Dakhla, la promotion des échanges commerciaux et autres initiatives conjointes ».
De son côté, l’analyste politique basé à Washington, Samir Bennis, considère que la continuité de la reconnaissance américaine de la marocanité du Sahara confirme « l’intime conviction » des Etats-Unis qu’il ne pourrait y avoir une solution réaliste et équitable du conflit du Sahara en dehors du projet marocain d’autonomie.
« Cette décision vient entériner un consensus international grandissant autour de la validité et la viabilité de ce projet en tant qu’initiative susceptible de permettre aux parties de parvenir à une solution politique mutuellement acceptable dans le cadre de la souveraineté marocaine », a expliqué Bennis dans une déclaration à la MAP.
Pour cet expert des relations internationales, le porte-parole du département d’Etat Ned Price a confirmé d’une « manière on ne peut plus claire que la reconnaissance américaine de la marocanité du Sahara n’est nullement prise sur un coup de tête ni une action non calculée ».
D’autre part, a-t-il ajouté, cette position américaine confirme que les Etats-Unis considèrent le Maroc comme un allié « sûr et indispensable » en Afrique du Nord et au Moyen Orient, mais aussi une porte d’entrée pour l’Afrique Sub-Saharienne.
« Le fait que l’actuelle administration démocrate ait jugé bon de maintenir la reconnaissance de la marocanité du Sahara montre bien que l’establishment politique américain considère le Maroc comme un allié majeur dans la région, qui sera appelé à jouer un rôle de premier plan dans le maintien de la stabilité dans la région », a-t-il souligné.
Fort de la légitimité de sa cause et de sa position, « le pouvoir de négociations du Maroc s’en trouve plus fort que jamais, ce qui, par ricochet, poussera d’autres puissances internationales et régionales à reconsidérer leur positionnement sur le différend » autour du Sahara, a conclu le politologue.
Pour Anouar Majid, universitaire et vice-président aux Affaires mondiales de l’université américaine de la Nouvelle Angleterre (UNE), l’administration Biden est « pleinement consciente de l’effort inlassable du Maroc pour parvenir à une solution juste et définitive » au différend régional sur le Sahara, de même qu’elle « apprécie à sa juste valeur » l’apport stratégique du Royaume au Sahel et en Afrique ainsi qu’au Proche Orient.
« Il n’y a aucune raison pour revenir sur une décision juste prise par le président Trump. L’administration Biden est constituée de diplomates chevronnés et de professionnels hautement compétents qui ont une bonne compréhension du monde en évolution », a-t-il estimé.
Pour lui, « le président Biden et le secrétaire d’État Blinken sont pleinement conscients des liens séculaires qui unissent les deux nations et apprécient l’influence stabilisatrice du Maroc en Afrique du Nord et dans le monde arabe ».
« En reconnaissant la souveraineté pleine et entière du Maroc sur le Sahara, le président Trump a mis un terme un gros casse-tête à la diplomatie américaine dans la région », a-t-il noté.
De l’avis du politologue Abdelkader Filali, président de l’institut Polisens à Ottawa, la continuité de la position américaine au sujet de la souveraineté pleine et entière du Maroc sur son Sahara montre que cette reconnaissance est « bien le fruit de plusieurs années de consultations et de persévérance » de la diplomatie marocaine, sous la conduite du roi Mohammed VI.
Les États-Unis déploient, a-t-il expliqué, « une stratégie globale dans leurs relations avec le Maroc, d’autant plus que le Royaume et l’Atlantique africain en général revêtent une dimension stratégique pour Washington ».
Le président de la communauté juive marocaine de Toronto, Simon Keslassy s’est dit, de son côté, « ravi de la position de la nouvelle administration du président Biden en faveur de la marocanité du Sahara » qui consacre la reconnaissance par une puissance planétaire, un acteur majeur des relations internationales et un membre permanent du conseil de sécurité.
« Chose à laquelle je m’attendais, vu les excellentes relations que les États Unis ont toujours maintenues avec le Maroc », a-t-il dit.
« Cette décision, juste et politiquement forte, devrait servir d’exemple à suivre pour les pays Européens « , a soutenu Keslassy.
AY