Tunisie : la croissance économique en panne
L’année 2023 se termine en Tunisie sur une note morose sur le plan économique, avec des indicateurs en berne dans plusieurs secteurs et des perspectives mitigées de reprise économique dans l’avenir.
Les réformes attendues et annoncées depuis belle lurette n’ont pas toujours trouvé le chemin de l’application, la crise des finances publiques, en l’absence d’un accord avec le FMI, n’a fait que s’amplifier, des pans entiers de l’économie tunisienne continuent à vivre sous perfusion.
Au niveau du marché intérieur, le pays ne parvient pas à résoudre l’épineux problème de l’approvisionnement du marché en produits essentiels et l’inflation poursuit une courbe ascendante.
A cela s’ajoutent une croissance molle attendue de 0,9%, qui ne permet pas la création suffisante de nouveaux emplois, et un investissement public et privé en berne.
Cette situation est imputée à l’absence de visibilité, aux appréhensions des acteurs économiques quant à un retour d’un dirigisme de l’État. Elle s’explique également par l’incapacité du pays de sortir sur le marché financier international pour obtenir suffisamment des ressources pour combler un trou budgétaire béant estimé à 12 milliards de dinars (1 euro = 3,3 dinars).
D’une manière générale, les experts économiques et financiers sont catégoriques, estimant que la Tunisie est en train de payer le lourd tribut de l’inaction et de l’absence de réformes.
Pour l’heure, la Tunisie reste confrontée à des difficultés d’accès au financement international, du fait d’un déficit public persistant et d’un taux d’endettement élevé, la dette publique ayant atteint des pics inégalés, passant de 67% à 80% du PIB entre 2017 et 2023. Bien plus, l’augmentation du ratio du service de la dette épuise les ressources nécessaires aux investissements publics et aux programmes sociaux.
Dans le même temps, le pays refuse toujours les réformes proposées par le Fonds monétaire international (FMI) qui lui permettraient de valider un plan d’aide économique.
Les chiffres actuels révèlent une situation préoccupante, nécessitant une croissance de plus de 5% pour rattraper le retard et rétablir l’équilibre. L’investissement, en particulier, a chuté de manière significative, passant de 21% du PIB en 2010 à seulement 6,8% aujourd’hui. De même, l’épargne globale nationale a diminué de 22% à environ 8% du PIB. Cette tendance réduit la capacité du pays à investir et crée un cercle vicieux.
L’autre constat concerne un problème de croissance. Les moteurs traditionnels, tels que l’investissement, les exportations et la consommation sont en panne, compromettant ainsi toute perspective de croissance, ce qui entrave le rôle fondamental que l’économie tunisienne est censée remplir en matière de création des richesses, d’emplois et de stimulation de la croissance.
Un des autres défis majeurs réside dans la dette, tant publique qu’extérieure, accumulée au fil des années. La dégradation de la notation souveraine de la Tunisie à dix reprises en douze ans souligne la gravité de la situation. Les rapports liés à ces révisions à la baisse offrent des conseils précieux sur la manière de redresser la situation, mais semblent ne pas avoir été pleinement pris en compte.
En dépit des performances du secteur touristique qui s’en est bien sorti, avec une augmentation des revenus du secteur de 47% et de la bonne progression des revenus des Tunisiens qui se situe à 6.6% du PIB, le pays est tenu de résoudre une difficile équation. En effet, le poids des subventions des entreprises publiques et du contrôle des prix commence à se faire sentir sur les finances nationales obligeant le gouvernement à faire face à d’importants remboursements sur le court terme, aggravant davantage la crise de la dette.
En 2023, l’économie tunisienne n’a pas retrouvé le chemin d’une reprise tant espérée. Le pays a connu, pour la troisième année de suite, une sécheresse sévère dont l’impact a été catastrophique. A cela s’ajoutent les défis de financement externe, l’accroissement de la dette d’importantes entreprises publiques et la multiplication des obstacles réglementaires.