Ces familles libanaises d’origine marocaine qui ont marqué l’histoire du Liban
Quand feu Hassan II disait que le Maroc est «un arbre dont les racines plongent en Afrique et qui respire par ses feuilles en Europe», le regretté souverain était bel et bien conscient que l’histoire des grandes nations ne s’écrit pas uniquement à travers leurs réalisations, mais aussi par leur capital humain qui fait la grandeur des civilisations.
En effet, le Maroc, fort de son histoire séculaire, a été présent dans les différentes régions du monde où l’homme marocain a bien marqué l’histoire de ses empreintes qui témoignent toujours de cette présence, comme c’est le cas au Moyen-Orient, notamment au Liban, au Bilad el-Cham et en Palestine, à titre d’exemples.
Dans ce contexte, l’historien et professeur universitaire libanais, Hassane Hallaq, a souligné que la présence des Marocains au Liban remonte à plusieurs siècles et que les familles marocaines figurent parmi les premières qui se sont installées à Beyrouth, notant que certaines familles marocaines étaient arrivées dans la capitale libanaise et dans d’autres régions de Bilad el-Cham lors de l’époque des Omeyyades et des croisades, puis après la chute de l’Andalousie et ultérieurement avec la fin du protectorat français.
Hallaq, qui est auteur d’une encyclopédie en sept volumes sur les origines des familles beyrouthines et dont une large partie a été consacrée à certaines familles d’origine marocaine, a dans ce cadre cité la famille d’ «Al Wazzan» dont les origines, a-t-il expliqué, remontent à «Béni Amer», une famille islamique descendante d’«Ahl Al Bayt ».
Après avoir rappelé que la ville marocaine de Ouazzane portait le même nom, le professeur universitaire a souligné que cette famille est connue particulièrement pour ses contributions dans les domaines de la science, du fiqh, de la politique, de la médecine et de la diplomatie.
L’histoire contemporaine de cette famille, installée surtout dans les villes de Beyrouth et de Saïda (sud), reste liée essentiellement à Shafik Al-Wazzan qui a occupé à deux reprises le poste de premier ministre au cours des mandats des présidents Elias Sarkis et Amine Gemayel.
Parmi les familles et tribus marocaines installées à Beyrouth, figurent également celles d’Al Abiyad, Idriss, Barghout, Jelloul, Jonoun (Guenoun au Maroc, dont descend l’érudit Abdellah Guenoune), Soussi, Snou, Itani (grande famille dont descend le maire actuel de Beyrouth, Jamal Itani), Majdoub, Maghribi, Mnimna et Houwari.
Hallaq a en outre souligné la présence de termes de la langue et des dialectes amazighs des régions du Souss, de l’Atlas et du Rif au Maroc, dans le dialecte libanais, citant dans ce sens le mot «Jebana» (cimetière) qu’utilisent les habitants de certaines régions du royaume, comme celle de Ouazzane.
D’autre part, l’historien s’est longuement arrêté sur les réalisations et les contributions des Marocains à Beyrouth et Bilad el-Cham dans les domaines religieux, socio-économique et politique, notant qu’ils ne se sont pas installés dans ces régions uniquement parce qu’ils étaient en quête du savoir, mais aussi pour soutenir leurs frères dans la défense de ces zones islamiques.
Certes, de nombreux Marocains étaient arrivés au Liban alors qu’ils étaient à la recherche du savoir, a-t-il fait remarquer, expliquant que c’est pour cette raison que des habitants de Beyrouth ne cachent pas leur fierté d’être d’origine maghrébine, et marocaine en particulier.
Et de poursuivre que l’accomplissement du rite du pèlerinage et la visite de la mosquée Al-Aqsa étaient également à l’origine de l’arrivée des Marocains à Beyrouth.
Hallaq n’a pas manqué de souligner «avec fierté» les réalisations accomplies par les Marocains au Liban, notamment à travers l’extension, la réhabilitation et la construction des mosquées, en particulier à Beyrouth, relevant qu’ils avaient également procédé à la création des zaouias islamiques, dont «Zaouia Hamra», «Zaouia de Bab Msalla» ou encore «Zaouia Al Maghriba», fondée par cheikh Mohamed Al Maghribi, une des figures religieuses marocaines du Moyen Âge.
Ils ont aussi contribué à la construction de tours militaires et des portes à Beyrouth, dont l’une portait effectivement le nom d’une famille beyrouthine d’origine marocaine, en l’occurrence «Bab Idriss» qui est l’une des sept portes que comptait la capitale libanaise, a-t-il ajouté.
Parmi les zones les plus importantes auxquelles les Marocains ont en outre participé à la création, on peut citer «Al Hamra» (principale artère de Beyrouth) qui compte parmi les zones les plus connues au niveau de la capitale, en particulier, et du Liban en général, a poursuivi l’historien.
Ils ont en outre contribué au développement des marchés commerciaux et des zones réservées aux artisans et aux différents métiers au niveau de la capitale, a-t-il dit.
Dans le même sillage, l’homme de lettres et fondateur de la maison d’édition «Dar Al Adab», feu Souhail Idriss, a été attaché à exprimer sa fierté de ses origines marocaines qui remontent à la ville impériale de Fès, a confié à la MAP sa veuve, Aida Matarji Idriss.
Contactée également par la MAP, la directrice actuelle de la maison d’édition, Rana Idriss, a souligné les visites fréquentes du défunt au Maroc, notamment à Fès et particulièrement au mausolée Moulay Idriss.
De son côté, l’écrivain et rédacteur au journal «Al Anwar», Sidi Mohamed Sbaï, comme il lui plaît d’être appelé, a confié à la MAP être un descendant de la famille des chorfas sbaïnes au Maroc, notant que parmi les personnalités libanaises relevant de sa famille figurent l’ambassadeur Rabie Sbaï et Abdelkrim Sbaï, ancien président de la municipalité de Beyrouth en 1956.
Par ailleurs, il convient de noter que certains agrumes, notamment l’orange marocaine dont des Marocains installés au Liban avaient apporté des plans qu’ils avaient implantés à Beyrouth et dans la région entière, sont très connus et sollicités au niveau des marchés populaires et modernes à travers le pays.
(MAP)