Séisme d’Al Haouz : l’incroyable histoire d’une vie sauvée dans le ventre d’une rescapée
Lekbira, une habitante du douar Assaiss (près de 96 km de Taroudant), a été ramenée, jeudi, chez elle saine et sauve… Et, miracle! portant toujours dans son ventre un fœtus vivant !
Dans ce douar enclavé, aux confins de la province de Taroudant, la joie se lit sur les visages des habitants venus nombreux accueillir la dame enceinte. Parmi eux, ses trois enfants qui ont manqué à leur maman.
Le sentiment du devoir accompli illumine les regards de tous les participants ayant mené de bout en bout l’opération de sauvetage : Fondation Mohammed V pour la solidarité, services du ministère de l’Intérieur, les FAR, les Forces auxiliaires, la Protection civile, la Gendarmerie royale et les services de l’hôpital provincial de Taroudant.
L’histoire de Lekbira, trentenaire, a commencé dans la nuit du drame, de vendredi à samedi. Elle, et sa petite famille, n’ont pas subi de dommages physiques graves, mais sur la toile, on parle d’une femme dans un état critique à cause d’une fausse couche.
L’évacuation des blessés n’était pas une sinécure dans cette zone enclavée, proche de l’épicentre du séisme. La route vers la commune de Tizi N’test, nichée sur une chaîne montagneuse, était coupée à cause des éboulements et des chutes de pierres. Le sauvetage héliporté aussitôt dépêché, tente quatre atterrissages, en vain.
Trois jours après, les équipes de secours atteignent le douar Assaiss, au forceps. Des aides d’urgence sont acheminées par les autorités, des interventions médicales assurées sur place et les blessés évacués.
Allongée sur une civière, Lekbira a été transportée par les brancardiers à pied le long d’une piste de 5 kilomètres, avant de rejoindre la route asphaltée. Aux côtés de quatre autres blessés, elle a été admise à l’hôpital Médico-Chirurgical de Campagne déployé par les FAR dans la commune de Tafingoult. Sur place, à la surprise de tous, l’examen échographique détecte des signes de vie : le fœtus, un mâle, à sept mois de grossesse, va bien.
Par précaution, Lekbira n’a pas été informée immédiatement, elle qui souffrait d’une grave crise de panique. Transférée vers l’hôpital provincial de Taroudant, elle bénéficie, deux jours durant, du suivi médical et du soutien psychologique. Une fois son état amélioré : « Lalla, votre fœtus va bien et c’est un garçon ! ».
Lekbira, émue aux larmes par la nouvelle, n’en croit pas ses oreilles. Au milieu des décombres, de la souffrance et des gravats, une vie est ressuscitée !
Petit bémol toutefois : cette immense joie, Lekbira souhaite la vivre et la partager avec les siens, avec sa famille. On lui promet de la raccompagner à son douar.
Jeudi matin, des équipes, tous corps confondus, chapeautées par la Fondation Mohammed V pour la solidarité, se mettent en route pour acheminer des aides vers Assaïss, en plus de deux autres douars limitrophes, Aït Ibourk et Aït Boukhzir. Naturellement, Lekbira est du voyage !
Aïcha, la soixantaine, sage-femme à l’hôpital provincial de Taroudant, accompagne le convoi. Le décor est émouvant. Une bouteille d’eau à la main, Aïcha fait 5 kilomètres à pied sous un soleil de plomb, sur un sentier émaillé de tous genres d’obstacles, aux côtés des brancardiers qui se relaient pour transporter Lekbira. Le trajet dure près de 45 minutes.
Déterminée et dévouée, Aïcha vient finir ce qu’elle a commencé et profiter de ce déplacement pour venir en aide à qui en a besoin, en l’occurrence d’autres femmes enceintes.
Lekbira, touchée par tant de soin et de compassion prodigués généreusement par ces hommes et femmes autour d’elle, n’a qu’une phrase à la bouche : « Veuillez me pardonner. Jamais je n’oublierai ce que vous avez fait pour moi ! ».
Mission accomplie vers 16h30 au douar Assaïss. Les aides ont été distribuées au profit des bénéficiaires, des interventions médicales assurées par des équipes spécialisées. Lekbira, entourée de ses enfants, leur promet « un frère dans deux mois, Incha Allah ».
Elle raconte aussitôt aux femmes du douar, venues prendre de ses nouvelles, son histoire, bien que ne trouvant pas les mots justes pour la décrire.
« Je l’appellerai Houcine », leur a-t-elle dit. Un prénom qui lui a été suggéré par une personne ayant participé à l’opération de sauvetage !