BCIJ. Meurtre d’un policier à Casablanca: ce qui s’est réellement passé (VIDEOS)
Les auteurs présumés de l’homicide volontaire avec mutilation du corps d’un policier à Casablanca se sont imprégnés, ces derniers temps, de la pensée extrémiste, et ont adopté le modus operandi et les tactiques du terrorisme individuel, a indiqué, vendredi à Salé, le directeur du Bureau Central d’Investigations Judiciaires (BCIJ), Cherkaoui Habboub.
S’exprimant lors d’un point de presse, consacré à jeter la lumière sur les développements de l’affaire de l’homicide volontaire avec mutilation du corps contre un policier en exercice de ses fonctions, Habboub a fait savoir que les données actuellement disponibles confirment que « les trois suspects se sont imprégnés ces derniers temps de la pensée extrémiste, car ils n’ont annoncé leur allégeance à l’organisation terroriste « Daech » qu’il y a environ un mois et demi, ce qui privilégie l’hypothèse d’un extrémisme rapide, compte tenu surtout de leur niveau scolaire médiocre ».
En outre, poursuit Habboub, l’un des trois individus arrêtés, qui est le principal suspect, est connu pour ses multiples antécédents judiciaires dans des crimes de droit commun, dont le dernier antécédent remonte à 2013, quand il a été condamné pour vol avec violence, consommation de drogue et possession d’armes blanches sans motif légitime.
Les pistes d’investigations ont confirmé que les suspects ont adopté le modus operandi et les tactiques du terrorisme individuel pour commettre leur crime odieux, avant qu’ils ne s’emparent des menottes et de l’arme de service du policier victime dans le dessein de s’en servir pour commettre un crime ultérieur à savoir le braquage d’une agence bancaire, détaille le directeur du BCIJ.
Et d’ajouter que les procédures d’investigations ont permis de confirmer l’élément de « préméditation » adopté dans ce projet terroriste, alors que les mis en cause ont repéré avec précision l’emplacement de l’agence bancaire ciblée, effectué des tournées de reconnaissance dans ses environs et convenu d’une méthode de braquage dans le but d’utiliser les profits de ce crime pour financer des activités terroristes.
Le directeur du BCIJ a confirmé le mobile terroriste après l’arrestation des trois suspects, comme l’a indiqué la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) dans son communiqué publié au sujet de cette affaire. Selon les données fournies par l’équipe d’enquêteurs, jusqu’à ce stade de la recherche, les trois suspects ont récemment prêté allégeance à l’organisation terroriste Daech, après que l’un des suspects ait prononcé ce qu’ils considéraient comme le « prétendu serment d’allégeance », qui a été adopté et prononcé par le reste des suspects, ajoute Habboub, notant qu’il s’agit d’un indice de leur implication dans une organisation terroriste dans le cadre d’un projet collectif visant à porter gravement atteinte à l’ordre public.
Les informations actuellement disponibles, ajoute Habboub, indiquent également que les suspects envisageaient de rejoindre l’organisation de l’État islamique dans la région du Sahel, avant de fléchir devant ce projet en raison du manque de sources de financement suffisantes pour assurer leur voyage, ce qui les a incités à adopter une alternative consistant à mener des opérations terroristes locales ciblant les agents de sécurité et les agences bancaires.
Par ailleurs, le directeur du BCIJ a affirmé qu’il n’était pas possible de privilégier aucune des hypothèses d’investigations lorsque le corps du policier a été découvert sur les lieux du crime, ce qui a contraint l’équipe d’enquêteurs à traiter toutes les hypothèses possibles, y compris l’hypothèse du motif terroriste, en tant que pistes nécessitant investigation, enquête et recherches approfondies.
« En effet, la méthode d’exécution de cet acte criminel, la méthode de mutilation du corps, la fonction de la victime en tant que policier et les indicateurs consistant à s’emparer de son arme de service et de ses menottes… sont toutes des données et des indicateurs qui ont confirmé dès le départ que nous sommes face à un acte criminel organisé, commis par plus de deux personnes au moins, et que les arrière-plans de cet acte peuvent être des motifs purement criminels, comme le vol, par exemple, ou ils peuvent être commis pour de motifs extrémistes », explique Habboub.
L’équipe d’investigation a travaillé d’arrache-pied pour recueillir des témoignages de dizaines de témoins à proximité du lieu de la découverte du corps de la victime et de l’endroit où le véhicule a été incendié, mais cela n’a rien apporté de nouveau dans le processus de recherche, a souligné Habboub, ajoutant que la police technique et scientifique a traité une grande collection d’échantillons et de traces collectées sur la scène du crime.
L’équipe d’enquêteurs a également téléchargé et traité des contenus numériques afin de déterminer les parcours des suspects, ainsi que de repérer le chemin emprunté par la voiture de la victime, a-t-il dit. Grâce aux efforts conjoints de l’équipe d’enquêteurs des services de la Direction Générale de la Surveillance du Territoire national (DGST) et de la Direction générale de la Sûreté Nationale (DGSN), il a été précédé à l’identification du premier suspect et de son arrestation à Casablanca, avant de procéder à l’arrestation des deux autres suspects respectivement à Sidi Harazem dans les environs de Fès, et à Casablanca.
Habboub s’est félicité de la forte interaction des citoyens, hommes et femmes, avec l’équipe d’investigation et d’enquête, notant qu’il s’agit d’une collaboration spontanée de la part d’un grand nombre de citoyens qui communiquaient chaque information, soumettant volontairement leurs témoignages au service de la justice dans l’espoir de clarifier la vérité et d’arrêter les personnes impliquées. Il a également salué la large solidarité exprimée par des franges de la société marocaine, qui ont fait part de leur sympathie avec la petite famille du policier, et avec sa grande famille représentée par l’institution de la sécurité nationale.
« A ce niveau d’investigation, on peut parler d’une cellule terroriste composée de trois principaux suspects : le prétendu émir de cette cellule terroriste (31 ans) et le deuxième suspect (37 ans), qui ont tous deux participé à l’exécution physique de l’homicide volontaire et de la mutilation du corps de la victime. Quant au troisième suspect (50 ans), il a participé de manière effective à modifier les traces du crime et à occulter les preuves après avoir délibérément mis le feu à la voiture de la victime. On peut également affirmer, ajoute Habboub, que les dangers de cette cellule terroriste ont été maîtrisés et ses menaces contre la sécurité des personnes et des biens ont été repoussées, notamment après que l’équipe d’enquêteurs a réussi à récupérer l’arme de service et les cinq balles volées.
L’expertise menée par le Laboratoire de police scientifique et technique a confirmé que cette arme n’a pas été utilisée et aucune balle n’a été tirée par les mis en cause, assure Habboub. S’agissant des pistes d’investigation adoptées pour clarifier ce crime terroriste odieux, et appréhender les personnes impliquées, Habboub a noté qu’il s’agit de l’aboutissement d’un travail conjoint et d’une coordination étroite sur le terrain entre la DGST et la DGSN, représentée par le service préfectoral de la police judiciaire de Casablanca, la Brigade nationale de la police judiciaire, et les experts de la police scientifique et technique.
Le directeur du BCIJ a également salué la contribution apportée par la Gendarmerie royale lors des procédures préliminaires de cette affaire, notamment dans les opérations d’inspection et de ratissage du lieu de découverte du corps de la victime, ainsi que du lieu où se trouvait sa voiture délibérément incendiée et abandonnée dans une zone rurale. Il a également tenu à remercier les représentants de l’autorité locale, qui n’ont ménagé aucun effort pour apporter le soutien et l’accompagnement nécessaires, afin de faciliter les tâches des équipes de recherche, d’investigation et de ratissage.
Dans ce sens, il a souligné que toutes les procédures d’investigation de terrain, l’expertise technique et scientifique accomplie dans cette affaire, ainsi que les opérations de diagnostic qui ont contribué à l’arrestation des suspects, ont été menées sous la supervision directe du Ministère public dans la ville de Casablanca et ce dans la première phase de la recherche, et sous la direction effective du Ministère public chargé des affaires de terrorisme après que la nature extrémiste et terroriste de ce crime abject soit apparue.
Habboub a souligné que les procédures de recherche confiées par le parquet compétent au BCIJ relevant de la DGST se poursuivent actuellement en coordination avec les services de la DGSN, afin d’identifier les éventuelles ramifications de cet acte terroriste, et identifier les individus présumés impliqués dans la complicité ou la participation à l’exécution de ce crime, en sus d’élucider toutes les circonstances de ce crime ignoble. Le démantèlement de cette cellule terroriste impliquée dans l’homicide volontaire avec mutilation du corps du policier, rappelle Habboub, a coïncidé avec un projet terroriste imminent dont les risques ont été neutralisés et mis en échec par les services de sécurité de Safi, en étroite coopération avec la DGST.
Il s’agit là aussi, note Habboub, d’un élément extrémiste partisan de « Daesh » qui a été arrêté, mercredi, dans la ville de Safi, après avoir prêté allégeance au prétendu émir de cette organisation terroriste. L’élément est impliqué dans la préparation de l’exécution d’un plan terroriste dans le cadre d’un projet individuel visant à porter gravement atteinte à l’ordre public. Le mis en cause a également été soumis aux procédures d’enquête judiciaire confiées par le Ministère public au BCIJ, pour élucider tous les éléments et contours de son projet terroriste.
S.L.