Effondrement des colonies d’abeilles: nouvelles explications (ONSSA)
Les apiculteurs marocains ont observé ces derniers temps une disparition anormale des abeilles. Un phénomène inédit qui suscite de nombreuses inquiétudes et provoque d’innombrables interrogations aussi bien chez les éleveurs que chez les spécialistes de ce domaine.
Pour mieux comprendre ce phénomène, Asma Kamil, Cheffe de la division de la santé animale à l’ONSSA présente, dans une interview accordée à la MAP, les dernières mesures prises pour identifier les véritables raisons qui motivent cette disparition.
1. Le Maroc fait face à une disparition anormale d’abeilles, quelles sont les véritables causes de ce phénomène ?
Le phénomène de disparition des abeilles appelé également « syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles » est caractérisé par le fait que les colonies d’abeilles quittent leurs ruches sans y revenir, alors qu’au niveau de la ruche, seule la reine et quelques ouvrières y restent.
Au Maroc, ce phénomène a été détecté récemment chez certains apiculteurs et dans certaines régions. Aussitôt, l’Office National de Sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires (ONSSA) s’est rapidement mobilisé, en collaboration avec la Fédération interprofessionnelle marocaine de l’apiculture (FIMAP), pour mener les investigations sur le terrain afin de déterminer l’ampleur de ce phénomène et d’en élucider les facteurs qui l’on favorisé.
Il est à signaler que ce phénomène de disparition des abeilles a été observé dans d’autres régions du monde, notamment en Europe, en Amérique et en Afrique. Les études et recherches menées pour comprendre et expliquer ce phénomène ont attribué son apparition à l’implication de plusieurs facteurs, notamment climatiques (comme le déficit des précipitations, l’augmentation des températures, etc.), environnementaux en lien avec l’insuffisance des parcours et des aires de butinage pour les abeilles, entraînant une insuffisance des ressources alimentaires, ainsi que l’état sanitaire des ruchers, y compris les mesures préventives adoptées et les pratiques de apicoles.
2. Est-ce qu’il y a des études en cours pour identifier les raisons derrière cette disparition?
Les enquêtes de terrain menées par les services vétérinaires de l’ONSSA, en collaboration avec les représentants de la FIMAP ont ciblé plusieurs provinces et ont permis de visiter et d’examiner environ 23.000 ruches dans plusieurs régions au pays et plusieurs prélèvements de la ruche et du couvain ont été effectués en vue de leur analyse au laboratoire.
Les premiers résultats qui ressortent de ces investigations et des analyses de laboratoire ont montré que ce phénomène de disparition des abeilles est un phénomène nouveau et concerne certaines zones et certains apiculteurs à des degrés variables. Les mêmes résultats n’ont pas mis en évidence la présence d’une maladie des abeilles.
En outre, s’agissant d’un phénomène nouveau et à causalité multifactorielle, l’ONSSA poursuit les investigations et approfondi les enquêtes, en étroite collaboration avec les différents acteurs et intervenants dans le secteur apicole, afin de mieux comprendre ce phénomène et d’en élucider les facteurs ayant favorisé son apparition.
Par ailleurs et s’agissant d’un phénomène de dimension internationale, l’ONSSA a organisé en février dernier un colloque scientifique international sur ce phénomène qui a été présidé par le ministre de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, Mohammed Sadiki.
Cet événement s’est fixé pour objectifs d’échanger les connaissances et les expériences internationales concernant le phénomène de disparition des abeilles afin de mieux comprendre ce phénomène et les facteurs qui favorisent son apparition. Le colloque a connu la participation par visioconférence de plusieurs experts internationaux d’Australie, de Belgique, des USA, de France, de Belgique, d’Allemagne, d’Italie et du Royaume Uni. Également, ont pris part à ce colloque scientifique plusieurs chercheurs et experts, des organisations internationales, des opérateurs et professionnels du secteur, de l’ordre national des vétérinaires, des représentants des associations de consommateurs ainsi que des responsables centraux et régionaux du ministère.
3. Comment lutter contre la disparition des abeilles ?
Suite à l’apparition de ce phénomène de disparition des abeilles, et conscient de l’importance socio-économique du secteur apicole, le ministère de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et Forêts a réagi rapidement et a mis en place un programme spécial afin de soutenir les apiculteurs touchés et réduire l’impact de ce phénomène à travers un ensemble de mesures, à savoir l’organisation d’une campagne nationale de traitement contre la varroase des abeilles afin de renforcer les colonies d’abeilles et améliorer leur état sanitaire, la mise en place d’un programme de sensibilisation et organisation des formations au profit des apiculteurs, notamment sur les bonnes pratiques en apiculture, la mise en place d’un programme de repeuplement progressif des ruches au bénéfice des apiculteurs touchés par le phénomène, la réalisation des études et des recherches scientifiques sur ce phénomène, le renforcement du système de surveillance et de suivi des mortalités des abeilles au niveau national, l’élaboration d’une base de données pour la traçabilité des ruchers et des ruches au niveau national et l’organisation de la transhumance pour une meilleure gestion des pâturages.
S.L. (avec MAP)