Maroc

Tourisme à Fès: c’est la cata !

L’Association régionale des riads et maisons d’hôtes (ARRMH) de Fès-Meknès a récemment réalisé un diagnostic sur l’état de l’hébergement touristique dans la ville de Fès. Menée du 1er au 20 février 2021, cette étude clarifie la réalité du secteur de l’hébergement touristique en montrant le poids des établissements échappant au contrôle du ministère du Tourisme.

En même temps, elle évalue l’impact de la concurrence déloyale sur les établissements classés, ainsi que l’absence réelle de filtres au niveau des OTA (Online Tourism Agency) qui commercialisent les hébergements sans distinction ni vérification de leurs statuts. Entre janvier 2017 et janvier 2020, la ville de Fès a connu une augmentation des unités non classées de l’ordre de 20% par an, ce qui est «très alarmant et suscite une réaction sans délai» selon les membres de l’ARRMH. Sachant que la majorité de la catégorie des non classés échappe tout simplement au fisc.

«L’inflation des formes d’hébergements touristiques non classés a eu un impact négatif sur l’activité du secteur dans le cadre formel. Cette concurrence déloyale a fortement impacté le modèle économique en tirant les prix à la baisse et en impactant les taux d’occupations et donc de rentabilité des établissements classés», déplore le président de l’ARRMH Fès-Meknès, Abdelkader Benkirane.

La croissance du nombre d’hébergements classés dans la médina (Riads/MH) est de moins de 10% par an, tandis que celle des hébergements non classés semblait plus importante.

«On peut estimer à 3 MDH par an le montant de la taxe de séjour perdue par la municipalité sur la base d’un taux d’occupation à 30% et d’une taxe de séjour à 15 DH. On est alors en droit de se demander si cette catégorie génère vraiment des emplois, ces derniers étant surtout des emplois non inscrits à la CNSS, sans contrat de travail et sans couverture sociale», explique Benkirane.

Malgré le manque crucial de données officielles sur les hébergements non classés, qui sont en grand nombre, la collecte des données Internet a permis de mieux étudier cette catégorie d’hébergements et d’en montrer les impacts négatifs sur le secteur. Les établissements classés par le ministère du Tourisme sont minoritaires et ne représentent que 45% du total, dont 39% pour la médina de Fès.

«Ces pourcentages sont en réalité encore plus faibles, car l’étude ne prend pas en compte les hébergements ne proposant qu’une seule chambre (estimés entre 15 et 20% du total), ainsi que les appartements situés dans la Ville nouvelle et peu distribués sur Internet», précisent les membres de l’ARRMH Fès-Meknès.

Ces hébergements sont surtout commercialisés sur Airbnb où il est difficile de les quantifier car totalement anonymes. Toutefois, une estimation raisonnable (sources croisées OTA) donnerait un total d’hébergements dans la ville de 450 à 500 lieux, soit 100 à 150 hébergements «underground» qui ne sont pas pris en compte dans cette étude. Situés essentiellement dans la médina, les riads non classés se distinguent par la variété des structures, 84 d’entre eux ayant moins de 5 chambres et 105 autres comptant plus de 5 chambres. La situation juridique de ces établissements est marquée par l’informel pur et dur (aucune autorisation), avec ou sans le statut de «Maison prête à louer » (MPAL). Il faut rappeler que le statut dérogatoire des MPAL a été mis en place par la municipalité de la médina en 2009 pour régulariser la situation de 30 riads qui, du fait de leurs petites tailles (moins de 5 chambres), ne pouvaient pas prétendre au statut «Maison d’hôtes». Suite à cette décision, ce statut dérogatoire a été octroyé largement de 2011 à nos jours, y compris pour des riads/MH de 5 chambres et plus, ce qui leur a permis d’échapper aux règles et aux charges imposées aux établissements classés.

Analyse «Satisfaction client»
Dans cette partie, l’ARRMH Fès-Meknès s’est basée sur les notes attribuées par les OTA (Booking, Expedia, Hotels.com, Trivago), plus fiables, car elles émanent de «vrais» clients. Au vu des résultats, l’étude constate des niveaux d’appréciation très contrastés. Contre toute attente, en effet, les hôtels sont les plus mal notés toutes catégories confondues avec une moyenne de 7,2 (5,10 pour le plus mal noté et 8,60 pour le mieux noté). Seule la majorité des hôtels 4* et 5* obtient une note supérieure à 8, tandis que les principaux points noirs des notes concernent la propreté, le personnel, les équipements, le confort et la connexion wifi. Avec une note moyenne de 8,58, les riads non classés semblent offrir de meilleures prestations.

C’est aussi dans cette catégorie que l’on rencontre le plus grand écart entre le mieux noté (10) et le plus mal noté (2), le plus d’avis signalant des arnaques sur les prix, des problèmes d’hygiène majeurs, des descriptions trompeuses, des vols ou des violences verbales envers les clients. Mais pour ce qui est des riads classés non-membres de l’ARRMH, les notes attribuées atteignent une moyenne très honorable de 8,85 avec une mini de 5,60 et une maxi de 9,80 soit un écart de 4,20 points. Les points négatifs concernent le plus souvent des problèmes de surbooking, d’entretien des lieux, de prestations non conformes (faux guides) ou excursions et transferts surfacturés. Parallèlement la catégorie des riads classés, membres de l’association reste la mieux notée avec une moyenne 9,14 (mini de 7,80 et maxi de 10) avec des points négatifs moins nombreux, dus principalement à l’expérience de séjour qui correspond aux attentes des clients, l’accueil et la présence du propriétaire ou du gérant.

Mehdi Idrissi


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