Campagne de vaccination: où en est le Maroc ?
Tout est presque prêt pour entamer la campagne de vaccination anti-Covid-19, dont la date de démarrage n’est pas encore fixée. Il faut en effet attendre le feu vert des laboratoires Sinopharm et AstraZeneca avant de donner le la à cette opération d’envergure. Contrairement aux rumeurs, le Maroc n’a pas encore reçu les premiers lots de vaccin. L’annonce du lancement de la campagne de vaccination se fera lorsque le Maroc aura reçu les premières doses nécessaires.
En attendant le précieux sésame, les pouvoirs publics ne sont pas restés les bras croisés. En coopération avec le ministère de l’Intérieur, tout le volet logistique a été mis en place tant sur le plan national que régional et local. Quant aux ressources humaines, aucune inquiétude ne doit subsister, d’après Khalid Ait Taleb qui a été convoqué par les députés de la Commission des secteurs sociaux afin de tirer au clair nombre d’interrogations qui taraudent les esprits des Marocains. Les professionnels du secteur de la santé seront épaulés si nécessaire par d’autres équipes (militaires, secteur privé, croissant rouge).
Un système informatique a été développé pour assurer la bonne gestion de la campagne de vaccination (cheminement des vaccins, gestion sur le terrain, suivi d’éventuels effets secondaires…). Tous les centres de santé concernés et les unités mobiles, mobilisées à cette fin, sont équipés en tablettes pour introduire dans le système toutes les informations nécessaires qui serviront non seulement pendant l’opération de vaccination, mais aussi pour la post-vaccination. Une grande partie des rendez-vous sera gérée en se basant sur les données de la Carte d’identité nationale (CIN).
Les personnes concernées recevront un SMS les informant du rendez-vous et du lieu de la vaccination. Les citoyens sont appelés à adhérer volontairement à l’opération de vaccination, car le but escompté est d’atteindre l’immunité collective. L’objectif affiché est de pouvoir vacciner 80% des Marocains âgés de plus de 18 ans, soit quelque 25 millions de personnes. Sans l’adhésion de tous, tous les efforts déployés seront, en effet, vains. Scientifiquement, il faut que 60%, au moins, de la population soient immunisés contre le virus pour stopper sa propagation.
Un passeport sanitaire, pour quoi faire ?
La vaccination n’est certes pas obligatoire, sauf qu’elle peut être nécessaire pour voyager à l’étranger, à titre d’exemple. Dans ce cadre, un passeport immunologique sera délivré aux personnes vaccinées. Maintenant, la question qui reste posée est celle de savoir si les Marocains seront au rendez-vous ? Les responsables semblent confiants à cet égard. Le Maroc aspire à sortir du cauchemar de la crise sanitaire le plus tôt possible pour non seulement assurer la relance économique mais aussi pour alléger la pression sur les ressources humaines de la santé qui sont «épuisées», pour reprendre le mot de Khalid Ait Taleb. En vue de réussir le pari, il faut miser sur la sensibilisation des citoyens dont une grande partie se fait encore des soucis quant à l’innocuité du vaccin, comme l’ont souligné plusieurs députés qui se disent, eux-mêmes, prêts à être vaccinés pour donner l’exemple et dissiper toutes les craintes sur les effets secondaires du vaccin. À cet égard, le ministre de la Santé a été, on ne peut plus, rassurant bien que les résultats des essais cliniques du chinois Sinopharm, auxquels le Maroc a participé avec 593 volontaires, se fassent toujours attendre. Néanmoins, et malgré l’absence des données finales, le Maroc dispose déjà des résultats d’observation des volontaires marocains qui ont participé aux essais. «Aucun effet secondaire grave n’a été enregistré», a tenu à assurer le ministre à plusieurs reprises. Il s’agit uniquement de douleurs locales, de rougeurs et d’indurations cutanées. L’optimisme est au rendez-vous chez Khalid Ait Taleb, Moulay Tahar Alaoui, président du Comité national technique de vaccination ainsi que Redouane Abouqal, membre de cette instance. «Nous ne sommes pas moins courageux que les États-Unis ou l’Angleterre qui ont lancé la vaccination», selon le professeur Abouqal. Rappelons que le Maroc a entamé en avril dernier les négociations pour être parmi les premiers pays à acquérir le vaccin. Il faut dire qu’il fallait être proactif car les capacités de production des vaccins au niveau international ne peuvent pas répondre aux besoins de tous les pays. Le royaume n’a pas opté pour d’autres vaccins en raison notamment de la complexité en matière du respect des conditions de stockage dans le cadre d’une large campagne de vaccination. Le Maroc ne peut pas, à titre d’exemple, assurer la logistique nécessaire pour garantir une conservation à -80 °C pour le vaccin Pfizer. Le stockage et la conservation du vaccin de Sinopharm ne nécessitent qu’une température située entre 2 et 8 degrés.
Contrairement aux réunions précédentes de la Commission des secteurs sociaux, qui ont été marquées par des critiques acerbes à l’égard du ministre de la Santé sur la gestion de la crise sanitaire, les députés, aussi bien de la majorité que de l’opposition, ont, cette fois-ci, salué les efforts du responsable gouvernemental et l’ont soutenu politiquement pour le lancement de l’imminente campagne de vaccination. Une manière de rassurer les Marocains quant à l’innocuité des deux vaccins qui seront dispensés aux Marocains, à commencer par les professionnels de la santé ainsi que ceux de la sûreté nationale et de l’enseignement qui sont «en première ligne». Khalid Ait Taleb est visiblement parvenu à convaincre les députés de la pertinence de la stratégie nationale en matière de vaccination contre la Covid-19. Néanmoins, les parlementaires appellent à la vigilance pour mener à bien cette opération, la première du genre au Maroc.
Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco