Enquête: plus on est riche et instruit, moins on fête l’Aid au Maroc
Chaque année, la rentrée scolaire et l’Aïd al-Adha constituent des moments importants pour les ménages marocains, en termes de changements d’habitudes ou de contraintes, notamment pécuniaires. Cette année encore, l’impact de ces dépenses est d’autant plus important que la rentrée et la fête de l’Aid ont lieu quasiment en même temps.
Les ménages marocains, notamment les plus défavorisés, doivent faire face à une double dépense exceptionnelle. Pour les 20% des ménages les moins aisés, le total de cette double dépense dépasserait environ 78% de leur dépense moyenne totale sur un mois.
Selon les données d’une récente enquête nationale sur la consommation et les dépenses des ménages, réalisées par le HCP (Haut Commissariat au Plan), le rituel du sacrifice n’est pas accompli par l’ensemble des ménages marocains: 4,7% d’entre eux ne l’ont pas accompli en 2013. Cette proportion a baissé, comparativement à la période 2000/2001 où elle avait atteint 5,2%.
Le non accomplissement de ce rituel est le plus souvent le fait de ménages citadins ou de personnes vivant seules. Les ménages urbains sont plus enclins à ne pas sacrifier un mouton que les ruraux (5,9% contre 2,5%). Les personnes vivant seules constituent la catégorie la moins concernée par le sacrifice (46,5%). Cette proportion tombe jusqu’à 0,8% pour les ménages composés d’au moins 6 personnes.
Par ailleurs, il s’avère que “plus on est riche et instruit, plus on a tendance à se soustraire à cette obligation religieuse”, affirme le HCP, chiffres à l’appui.
Près de 12% des ménages appartenant aux 10% de la population la plus aisée ne sacrifient pas de mouton, contre moins de 2% pour les ménages relevant des 10% de la population la plus pauvre. De même, 11,6% des ménages qui ont un niveau d’enseignement supérieur s’inscrivent dans cette tendance, contre 4% pour ceux sans niveau d’instruction.
Le sacrifice prélève près de 29% en moyenne de la dépense globale mensuelle du ménage marocain. Sur la base de cette moyenne, la charge financière sur le budget des ménages est variable selon leur niveau de vie: elle représente plus de la moitié (57%) de la dépense globale mensuelle pour les 10% des ménages les plus pauvres, contre 15% pour les 10% les plus aisés.
L’Aïd al-Adha représente près de 41% de la quantité annuelle des viandes rouges consommée par les ménages. Cette quantité est plus élevée pour les 20% des ménages les plus pauvres (65,4%), contrairement au quintile le plus aisé (31,3%).
Le prix moyens des animaux d’abattage, à cette occasion, s’est élevé à 1841 dirhams en 2013 contre 1100 dirhams treize années auparavant (en 2000/01), enregistrant ainsi une augmentation de 67%, soit l’équivalent de +4% annuellement. La dépense générée par l’ensemble des ménages a atteint 13 milliards de dirhams.
Côté rentrée scolaire, les prix dans le secteur de l’enseignement ont tendance, ces dernières années, à augmenter continuellement avec un rythme supérieur à l’inflation. Depuis 2007, le prix global dans le secteur a augmenté annuellement de 3,4% en moyenne (ce qui a engendré au final une hausse cumulée de 40% sur dix ans). Les secteurs de l’enseignement secondaire et pré-secondaire sont plus dynamiques en la matière, avec une hausse moyenne annuelle de leurs prix de 4%. Il est à noter aussi l’augmentation des frais d’inscription (+4,7% en moyenne), comparativement aux frais de scolarisation (+3,3%).
La rentrée scolaire 2013/2014 a accaparé en moyenne 26% (environ 1751 dirhams) de la dépense mensuelle des ménages marocains ayant des enfants scolarisés (qui représentent 62,2% du total des ménages). Par personne scolarisée, cette dépense s’est située à 844 dirhams. Elle varie selon le milieu de résidence, passant de 1093 dirhams par enfant en milieu urbain à 443 dirhams en milieu rural. Un ménage parmi les 20% les plus aisés supporte une charge 5,6 fois plus élevée que celle d’un ménage appartenant aux 20% les moins aisés. Ces charges avoisinent respectivement 2099 et 373 dirhams, toujours selon les dernières données du HCP.
S.L.