Discours du 20 août : Une vision royale multidimensionnelle (Décryptage)
Par Taoufik Jdidi
Le discours prononcé par le Roi Mohammed VI à l’occasion de la révolution du Roi et du peuple est un moment de profondes réflexions sur les réalisations et sur les choix stratégiques du pays.
Cette année, le premier axe qu’a abordé le Souverain, même s’il a surpris les observateurs, a traité d’une page de l’histoire des peuples marocain et algérien. L’angle bien précis de la lutte commune pour l’indépendance et l’interdépendance des mouvements de libération, c’est un rappel d’histoire aux nouvelles générations quant au destin commun des deux peuples. Ce rappel est important à plus d’un titre, puisque toute une génération d’Algériens a été formatée par le pouvoir algérien dans une vision anti-marocaine tendant à effacer sur les moyens et long termes tous les liens qui unissaient deux peuples que rien ne différencie.
Il était utile de rappeler que le soulèvement de Setif en 1954, qui a annoncé le début de la révolution algérienne, avait un lien direct avec les décisions prises par les leaders des mouvements de la résistance d’étendre la révolution du 20 août 1953 à tous les pays du Maghreb. Cette solidarité, qui fait défaut aujourd’hui, empêche les pays de la région à relever les défis auxquels, ils sont confrontés.
Le deuxième axe a trait tout naturellement aux rapports du Maroc avec le reste du continent africain. Conjoncture oblige et puisque le Maroc déposera prochainement sa demande d’adhésion à l’Union africaine, il était utile de faire le point sur la stratégie du pays dans ce domaine. En effet, le Souverain a bien souligné que l’Afrique est au cœur de la diplomatie marocaine. Cela se confirme encore aujourd’hui plus que par le passé et montre que le Maroc entend renforcer ses liens économiques, politiques et culturels avec tous les pays africains sans distinction, même avec ceux qui n’épousent pas ses thèses à propos de son intégrité territoriale. Cette nouvelle vision qui s’inscrit dans le sillage du renforcement de la coopération Sud-Sud, ne semble pas être approuvée par certains pays. Là, le Souverain tenait à rassurer ses partenaires, et même ses détracteurs, en mettant en exergue les différents aspects d’une coopération mutuellement avantageuse, dont le seul objectif est de contribuer au développement des populations qui ont pâti des décennies durant des séquelles des politiques des puissances coloniales.
Tout en parlant de l’Afrique, le discours ne pouvait ignorer de mentionner le phénomène de l’immigration à partir des pays subsahariens. Sur ce registre, le Maroc est fier, souligne le Roi, d’avoir été précurseur pour avoir élaboré une stratégie intégrée de régularisation de milliers de migrants subsahariens. Ainsi, le Maroc n’est plus considéré comme un pays de transit, pour ceux qui veulent atteindre l’autre rive de la Méditerranée, mais bel et bien un pays d’accueil. Mais malgré les efforts consentis, certains milieux mettent en doute les bonnes intentions et les nobles objectifs du pays. A ceux-là, le Souverain conseille de faire ne serait-ce qu’une petite partie de ce qu’a réalisé le Maroc pour sauvegarder la dignité de ces personnes qui ont traversé des milliers de kilomètres, et au péril de leur vie, pour se retrouver parmi nous.
Et dans la droite ligne de la question de l’émigration et au vu de la conjoncture que traverse le continent européen après l’arrivée de vagues successives de migrants, fuyant les guerres au Moyen- Orient et la succession d’attentats terroristes, Le Roi ne pouvait pas ne pas s’adresser à la grande communauté des Marocains résidents à l’étranger. Celle-ci subit les contrecoups d’une situation empreinte de crispations et de polémiques, mais elle doit, poursuit, le souverain, continuer à résister dans la dignité et l’honneur tout en demeurant attachée à ses valeurs et traditions ancestrales et servir d’ambassadrice du Maroc à l’étranger.
Bien entendu, un certain nombre d’événements viennent mettre leur situation en difficulté, notamment à cause d’une poignée d’égarés qui ne comprennent rien à l’Islam et qui s’enrôlent dans des mouvements radicaux et terroristes pour servir des desseins dont ils ignorent la portée. Ceux-là sont eux-mêmes victimes de pseudo-musulmans, dont le seul but est de détruire la civilisation humaine au nom de l‘Islam et d’attiser la haine entre les différentes communautés et religions.