Fatiha Daoudi: hommage posthume à une grande dame
Par Larbi Alaoui
Fatiha Daoudi n’est plus
Une grande dame vient de nous quitter! Fatiha Daoudi s’en est allée sur la pointe des pieds, discrètement et prématurément! Un florilège d’hommages posthumes lui a été consacré depuis sa disparition, des suites d’une longue et pénible maladie.
Sur les réseaux sociaux, comme dans les médias, à l’instar de nos confrères de Huffpost dont elle était « l’une des plus ferventes et brillantes collaboratrices », l’on ne tarit pas d’éloges sur cette grande dame. Sous le titre « Fatiha Daoudi, une fervente militante s’en est allée », le média, qui publiait les blogs de la défunte, lui a consacré un long article émouvant qui retrace un portait complet sur sa carrière, ses oeuvres et son militantisme.
Hymne déchirant aux ppulations transfrontalières
Nous en retenons que cette grande dame, Docteure en sciences politiques, lauréate de l’Université de Grenoble Alpes, avait fait sienne la cause et le vécu douloureux des populations maroco-algériennes. Et ce, depuis la fermeture des frontières terrestres entre le Royaume et le pays voisin de l’est, en 1994.
D’ailleurs, l’on se rappelle qu’en réponse à la tribune de l’écrivain et journaliste algérien, Kamel Daoud, publiée par l’hebdomadaire TelQuel sous le titre « Je suis Marocain », Fatiha Daoudi avait écrit un beau texte intitulé « Je suis une frontalière, Monsieur Daoud ». Dans ce blog écrit en février dernier, la juriste, politiste, experte en genre et droits humains avait crié son désespoir face à cette fermeture inopinée des frontières, pénalisant lourdement les populations algéro-marocaines limitrophes.
Tout en rappelant combien la tribune de Kamel Daoud « a eu l’effet d’un baume sur mon coeur de frontalière déchirée », la disparue avait décrit la situation des plus pénibles que vivent, comme elle qui avait de la famille en Algérie, des milliers de Marocains et d’Algériens de chaque côté de ces frontières closes. »Je vis la fermeture actuelle des frontières dans la trivialité et ses tracasseries quotidiennes. C’est le cas de toute la population vivant de part et d’autre des frontières(…). C’est dû au fait qu’elle est constituée des mêmes familles et, bien souvent, les parents sont d’un côté et des enfants de l’autre », avait-elle douloureusement précisé.
« Le burkini n’est pas un vêtement comme les autres »
Fatiha Daoudi était également une fervente militante de la cause féminine. Egalité dans l’héritage, libertés individuelles, tenues vestimentaires, entre autres causes humaines et humanistes, faisaient aussi partie du credo sacro-saint de cette militante infatigable.
Et bien avant le débat houleux, inénarrable et vain entre PJDistes, PAMistes et USFPistes, sous l’Hémicycle, sur les tenues vestimentaires de la gent féminine, bien avant cette campagne éhontée sous le Hashtag « Sois un homme et couvre tes femmes! », Fatiha Daoudi avait exprimé ce qu’elle pensait des tenues venues d’ailleurs que l’on veut, de force, imposer aux Marocaines, pour le cas qui nous concerne, et pour les femmes musulmanes en général.
Rétorquant à Edwy Plenel, président de Mediapart, qui « pérorait sur la liberté vestimentaire des femmes musulmanes », elle s’était inscrite en faux contre l’affirmation du journaliste hexagonal prétendant que le burkini est un vêtement comme un autre. « Non, Monsieur Plenel, le burkini n’est pas un vêtement comme un autre », avait-elle intitulé cette réponse de la bergère au berger. « Je sais de quoi je parle puisque je suis une femme de culture musulmane et vivant dans un pays, le Maroc, où l’islam est religion d’Etat ».
Post mortem
Fatha Daoudi n’est plus! Sa disparition a constitué une onde de choc pour tous ceux qui la connaissaient, l’avaient lue et admiré ses multiples combats pour la juste cause. Elle s’en est allée vers un monde, sans doute meilleur, où discrimination, misogynie, sexisme, injustices diverses, tutelle phallocrate n’ont plus droit de cité!
Reposez en paix, Madame! Que Dieu vous ait en Sa sainte miséricorde!
« Nous sommes à Dieu et à lui nous retournons ».
L.A.