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Baddek Eih: L’étrange choix de Saad Lamjarred

Par Fatima-Zahra HAMIL

Impossible d’échapper à la nouvelle chanson de Saad Lamjarred, non pas qu’elle soit particulièrement belle ou élogieuse pour la femme, mais pour l’inspiration de ce nouveau tube qui comptabilise déjà 11 millions de vue sur la chaîne YouTube de la star que je ne pensais pas revoir de sitôt sur la scène artistique.

Je suis une fan absolue de films indiens, j’ai grandi à l’époque où le vendredi après-midi était le jour de Saint Bollywood: trois heures hebdomadaires d’acculturation à la sauce Mumbaï, on ne s’en remet pas.

Alors quand mon amie Kavita me parle de la reprise d’une chanson indienne par un marocain, je pense d’abord à Jabra Fan de Grini, jusqu’à ce que je vois son air perplexe lorsqu’elle ajoute: « c’est la reprise de Binte dil »…

Je suis forcément curieuse et déjà à la recherche de la fameuse reprise sur YouTube…  jusqu’à ce que je découvre l’auteur de ce … je ne trouve pas de mot et je ne veux froisser personne: les goûts et les couleurs… n’est-ce pas? Je ne lance pas non plus le match Saad Vs Ranveer dans la bassine…  les goûts et les couleurs…

Saad? Comment? Pourquoi? Kifash? 3lash? Kyon?

Voici toutes les questions que mes sourcils et mes yeux ont mimé à ce moment-là… pour ceux qui ne connaissent pas le film et la chanson je vous explique rapidement dans un ordre croissant de perplexité:

Kaun Hai Padmaavat?

Padmaavat est historiquement un poème mythique de la littérature hindoue et islamique. Les 600 vers écrits par Malik Muhamad Jayasi relatent l’histoire de Padmaavati, une reine Rajput et du Sultan Alauddin Khalji connu pour son désir insatiable et obsessionnel pour les femmes … première interrogation donc: y’aurait-il un message subliminal?

Binte dil? Sach men? Ma7chemtish?

Le poème de Jayasi a inspiré le film éponyme: Padmaavat dont est issue la chanson « Binte Dil » reprise par notre « crooner national ». Cette chanson est interprétée, dans le film, par le personnage de Malik Kafur, esclave et bras armé du sultan Khalji.
Dans la scène de la chanson où Malik déclare sa flamme à son Sultan, on ne peut pas douter de ses intentions: les images sont sans équivoque. Les historiens avaient d’ailleurs fait étal de la relation sodomite qui liait Alauddin Khalji à son esclave.
Seconde interrogation donc: Y’aurait-t-il un message subliminal? (je ne me répète pas, je pose juste la même question).

Et si c’était par la fin que tout commençait?

Le film entier tient à sa scène finale – très controversée – où la reine Padmi commet le « Jauhar » (sacrifice par auto-immolation) pour échapper à l’envie possessive du Sultan Khalji et préserver son honneur… Troisième et dernière interrogation donc: Baddek tfahimna eih?

L’histoire et le film traitent de la concupiscence du Sultan Alauddin Khalji et son désir de dominer et posséder les femmes même et surtout contre leur gré, il est aussi question de sa sexualité débridée et sa cruauté sans faille au point où Padmavaati, reine légendaire, préfère mourir que de succomber au désir vorace du Sultan. Avec autant de connotations, je me suis naturellement étonnée du choix de cette chanson.

Ceci dit, merci quand même de faire découvrir à ceux qui ne les connaissaient pas déjà – à défaut du chef d’oeuvre sufi – du moins l’oeuvre bollywoodienne. Au moins cette nouvelle chanson aura été utile à ça!


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