Economie

François Conradie : “La baisse de la demande chinoise est un risque qui plane sur l’économie africaine”

Actuellement, ce ne sont pas vraiment les guerres en Ukraine et au Proche-Orient qui sont les principaux risques pesant sur les économies africaines. C’est plutôt la baisse de la demande chinoise sur les matières premières africaines. C’est ce qu’indique, dans cette interview, François Conradie, économiste à l’Oxford Economics Africa.

Quels sont les secteurs économiques à surveiller à travers le continent au cours des prochains mois ?
François Conradie : On a récemment vu une baisse des taux directeurs des banques centrales dans les principales économies du monde. Je pense que ce mouvement devrait bientôt arriver en Afrique. Les banques centrales africaines vont probablement commencer elles aussi à baisser leurs taux directeurs. Et habituellement, ce qui se passe avec ces décisions, c’est que cela profite à certains secteurs, comme la construction et les infrastructures. Il y a aussi – dans des pays comme le Nigéria et l’Égypte – une dévaluation des monnaies locales, la Naira et la Livre égyptienne. Cela peut encourager les industries locales par rapport aux importations et favoriser ainsi les grands investissements industriels. Ce sont là des effets à surveiller dans les prochains mois.

Quels sont les risques qui pèsent sur certains secteurs en Afrique ?
Le principal risque, c’est l’affaiblissement des ménages en raison de la baisse du pouvoir d’achat, qui résulte des différentes crises du covid et de la guerre en Ukraine. La perte du pouvoir d’achat et la baisse de la demande des ménages sont donc un phénomène à surveiller en Afrique. Et cela pousse à poser la question de savoir si les gouvernements seront capables de lever certaines taxes afin de soutenir le pouvoir d’achat.

Il faut dire que cela n’est pas toujours évident, surtout dans un contexte de difficultés, pour certains États, à accéder à des fonds et ainsi à renforcer leurs capacités financières. Il faudra donc voir quelles sont les solutions que les pays africains auront à prendre face à cette situation.

Comment jugez-vous les nouvelles visions de développement économique dans des pays comme le Sénégal, où un nouveau gouvernement tente d’imprimer sa marque ?
Le Sénégal a un plan intéressant  pour faire profiter son économie  de sa position géographique. Sauf que le gouvernement vient de se rendre compte que la situation fiscale est pire que ce qu’il croyait avoir trouvé sur place. Là, il s’agit d’observer les capacités du nouveau gouvernement à gérer son budget et surtout à dépenser et à investir.

Dans de nombreux pays, on constate une tendance à la hausse des impôts et des taxes. Je ne pense pas que cela soit souvent des mesures populaires. Donc là, il faut observer et voir comment ces gouvernements essaient de mettre en avant ou d’imprimer leur marque en matière d’innovation fiscale et sur le plan budgétaire.

Globalement, doit-on s’inquiéter des perspectives de développement économique de l’Afrique, rester prudent ou optimiste ?
Je pense qu’il faut rester prudent. Avec les guerres et les conflits qui se déroulent dans le monde, les choses sont assez inquiétantes. Ce sont des événements qui, souvent, font augmenter les prix des matières premières. Mais malgré tout ça, le principal doute qui pèse sur l’économie mondiale, c’est la baisse de la demande des industriels chinois. C’est cela la vraie inquiétude.

Tout simplement, parce que la demande chinoise en matières premières africaines booste les échanges du continent. Sauf que là, si cette demande n’est pas au rendez-vous, on risque d’en voir les conséquences dans l’économie de plusieurs pays africains. C’est pour cela que je dis qu’il faut rester prudent et observer l’évolution de cette tendance.

ODD : inquiétudes aux Nations-Unies

«De nombreux pays en développement (PED) ne peuvent pas investir dans leur avenir alors qu’ils luttent pour répondre à leurs besoins immédiats : payer les salaires et assurer le service de la dette», alertaient récemment le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, et son adjointe Amina Mohammed.

Cette dernière a souligné la triste réalité selon laquelle seulement 17 pour cent des cibles des ODD sont en bonne voie, soulignant les graves contraintes financières auxquelles sont confrontés les PED.

«Les perspectives économiques de ces pays restent sombres. Et même si l’économie mondiale a été décrite comme résiliente – il y a une sortie «en douceur» au Nord –, mais il y a une entrée brutale en récession au Sud», a-t-elle fait savoir.

Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO

 


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