Entreprises africaines. Julien Wagner : “10% des plus grandes entreprises africaines sont marocaines”
Julien Wagner
Journaliste
Jeune Afrique vient de publier son édition annuelle du classement des 500 plus grandes entreprises africaines en termes de chiffres d’affaires. 10% de ce total sont des entreprises marocaines, dans un contexte de très bonne tenue du secteur des hydrocarbures dans le continent. Interview avec Julien Wagner, l’un des auteurs du rapport.
Comment se comportent les entreprises marocaines dans le Top 500 des plus grandes entreprises africaines ?
Les entreprises marocaines représentent plus de 10% des entreprises africaines présentes dans le Top 500. Ce qui caractérise le Maroc, c’est la grande diversité des secteurs dans lesquels ses entreprises sont présentes. Il n’y a pas un secteur qui domine par rapport aux autres. On note une grande diversité, allant du secteur minier, à celui des télécoms, en passant par les finances, les énergies, le commerce, le transport logistique, ou l’agro-industrie.
Je noterai également que de grandes entreprises marocaines opèrent dans des secteurs tels que les call-centers, à l’instar d’Intelcia, ou encore dans la cimenterie comme LafargeHolcim. En un mot, on notera pour cette édition, la progression du Maroc dans le classement et la diversité des secteurs dans lesquels opèrent ses entreprises.
L’autre constat est que l’OCP a réussi à faire son entrée dans le top10 des 500 plus grandes entreprises africaines ?
C’est en effet l’un des faits marquants de ce classement pour les entreprises marocaines. L’OCP a réussi à se hisser à la place de la neuvième plus grande entreprise africaine. Comparé au classement de l’année dernière, l’OCP a fait un bon non négligeable de deux places, puisque l’office était 11e il y a tout juste un an. En 2022, l’OCP a fait un chiffre d’affaires de près de 11 millions de dollars.
L’OCP n’est pas uniquement une entreprise qui génère seulement de l’activité, mais aussi de profit, avec des bénéficies estimés à 7 milliards de dollars en 2022. Évidemment, l’OCP a bénéficié d’un contexte qui a été très favorable, notamment avec l’envolée des cours du phosphate qui a été provoqué par la guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie.
On sait que la plupart des concurrents de l’OCP sont en Russie. Cela dit, en 2023, le chiffre d’affaires de l’OCP a connu une baisse de 23%. Il ne s’agit pas d’une contre-performance, mais c’est plutôt l’année 2022 qui a été une année exceptionnelle. Ce qui est aussi à signaler avec l’OCP, c’est que l’entreprise est devenue une sorte de pieuvre, avec des investissements très diversifiés dans plusieurs secteurs, allant de l’énergie, à l’intelligence artificielle, en passant par la formation, etc.
En dehors des entreprises marocaines, que faut-il retenir de classement sur les chiffres d’affaires du Top 500 africain ?
D’abord, il faut noter que cette édition est assez exceptionnelle. En 2022, les conditions étaient assez favorables, pour une reprise sur le continent. On s’aperçoit, en cumulant les chiffres d’affaires des 500 plus grandes entreprises africaines, qu’un record a été réalisé, puisque ce chiffre d’affaires cumulé atteint les 760 milliards de dollars. C’est un montant inédit, qui s’explique, en particulier, par la flambée des prix du gaz et du pétrole en 2022, en raison du conflit en Ukraine.
D’ailleurs, 25% du chiffre d’affaires cumulé proviennent du secteur des hydrocarbures. Par exemple, la Sonatrach, en Algérie, est la première entreprise africaine. Et elle représente à elle seule, le tiers du budget de l’Algérie. En plus, en 2022, elle a à peine augmenté ses capacités de production, mais elle a presque doublé son chiffre d’affaires. C’est en effet que la flambée des prix des hydrocarbures a contribué à énormément gonfler ce chiffre. C’est aussi le cas au Nigeria et en Angola. En dehors des hydrocarbures, je peux citer le secteur des mines. Il prend de plus en plus d’ampleur.
Est-ce que cette performance par secteur se retrouve également dans celle des pays ?
Alors, je pense qu’il faut noter qu’il y a des pays qui sous-performent malgré tout. C’est le cas de l’Égypte. Beaucoup d’entreprises égyptiennes ont souffert des deux dévaluations de la livre égyptienne en 2022. Celle-ci a perdu quasiment 57% de sa valeur. Cela a eu pour conséquence de réduire le poids des entreprises égyptiennes lorsque leur devise est convertie en dollars.
Record du chiffre d’affaires des entreprises africaines
Un cap record est atteint avec le classement des 500 plus grandes entreprises africaines. Les plus grandes entreprises africaines atteignent un chiffre d’affaires cumulé de 760 milliards de dollars, soit une hausse de 14,1 % par rapport à l’année précédente.
«Les secteurs de l’énergie, des mines, mais aussi du tourisme et du transport aérien se sont distingués, illustrant la dynamique de croissance robuste du continent, malgré un contexte mondial marqué par la montée des tensions internationales et une inflation tenace», poursuit «Jeune Afrique».
La récente flambée des prix des hydrocarbures permet aux entreprises opérant dans ce domaine de dominer le haut du classement grâce aux performances exceptionnelles enregistrées. Elles contribuent largement à l’augmentation record du chiffre d’affaires cumulé des 500 premières entreprises.
Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO