Prix du pétrole, Russie-Ukraine…quels risques pour le Maroc ?
Le cours du pétrole Brent a dépassé la barre fatidique des 100 Dollars US pour se situer à 103,02 dollars US, et le cours du baril est à 98,19 dollars US, cette semaine. Une hausse qui risque de perdurer, puisque certains analystes s’attendent à ce que le prix du Brent dépasse 120 dollars US à la fin de l’année en cours. Cette situation est très inquiétante pour le Maroc qui, frappé par la sécheresse, va devoir donc importer du blé, mais aussi du gaz dont les prix ne cessent aussi de grimper. Que doit faire le gouvernement ?
« C’est la crise de 1973 bis » ! Ce jeudi 24 février 2022, le cours du pétrole Brent a dépassé la barre fatidique des 100 dollars US pour se situer à 103,02 dollars US, et le cours du baril de pétrole est à 98,19 dollars US. Une hausse qui risque de perdurer, puisque certains analystes s’attendent à ce que le prix du Brent dépasse 120 Dollars US à la fin de l’année en cours. Ce qui est très inquiétant !
D’autant plus inquiétant que, si pour beaucoup d’économistes, le premier choc pétrolier de 1973 était la conséquence directe de la réaction de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) à la forte baisse du dollar après la fin des accords de Bretton Woods, celui qui vient de démarrer avec la guerre en Ukraine, est beaucoup plus complexe. En effet, c’est la superposition de plusieurs effets collatéraux de la crise du Covid-19, dans laquelle le monde se débat encore.
En plus du pétrole, les prix de toutes les autres matières sont en hausse
En plus du pétrole, la goutte qui fait déborder actuellement le vase, il y a la flambée des cours de presque toutes les autres matières premières (bois, blé, acier, fer, cuivre, gaz, etc). Un phénomène auquel s’est ajouté le renchérissement des coûts du transport, ce qui a entraîné des retards d’approvisionnement et une tension inflationniste dans pratiquement toutes les économies, dont celle du Royaume, qui se retrouve désormais rudement affectée, en raison de plusieurs facteurs. Le premier, c’est que dans la loi de Finances 2022, le gouvernement a tablé sur un baril de pétrole à 80 dollars.
Après 55 jours de son exécution, le baril est à 98,19 dollars, soit déjà plus de 18 dollars en plus par baril, ce qui est une somme non négligeable qu’il va falloir trouver au plus vite. Autre chose, pour rester sur la guerre entre la Russie et l’Ukraine, qui a entraîné cette flambée des cours du pétrole, l’Ukraine n’est pas un pays lambda pour le Maroc.
Ce pays de l’Est est, en effet, un de nos fournisseurs stratégiques de blé. Une denrée d’importance, dont le Royaume a absolument besoin, avec la sécheresse qui se profile à l’horizon. Certes, il y a encore un peu d’espoir avec les dernières pluies de printemps, mais les spécialistes ne sont guère optimistes. Dans le meilleur des cas, ils tablent sur une récolte céréalière de 30 millions de quintaux, contre 80 millions nécessaires chaque année. À signaler, par ailleurs, que ce conflit entre la Russie et l’Ukraine risque aussi de déteindre sur le prix du gaz naturel, dont le Maroc est désormais un importateur net, suite notamment à la fermeture du Gazoduc Maroc Europe.
Pour faire face, il faut activer tous les leviers de la politique économique
Alors, quelles doivent être les priorités du gouvernement d’Akhannouch pour sortir de cette mauvaise passe ? «Il faut d’abord tout mettre en œuvre pour que l’approvisionnement du pays à partir de l’étranger se fasse convenablement. Pour ce faire, il faut faire jouer les partenariats avec les pays producteurs qui sont proches», suggère l’économiste Ahmed Azirar.
Ensuite, pour ce qui concerne les autres actions d’urgence à mener à l’intérieur du pays, Azirar parle d’agir sur les marges des distributeurs de produits pétroliers, de voir s’il est possible d’agir sur la fiscalité des hydrocarbures pour grignoter sur les marges, de soutenir les secteurs les plus touchés, de protéger également le transport et les industries qui utilisent le pétrole ou ses dérivés comme combustibles.
Bref, de l’avis de l’économiste, il faut trouver les moyens pour agir contre la crise tout de suite. C’est possible de les trouver du côté des droits de douane, des impôts, des recettes ou encore du côté des dépenses. En tous cas, «dans pareille situation, le gouvernement est obligé d’activer tous les leviers de la politique économique. Il doit notamment agir sur le budget, aussi bien au niveau des recettes que des dépenses. Il doit aussi réagir sur le plan monétaire pour trouver les financements.
Ceci sans oublier l’action sur le taux de change, notamment pour se couvrir contre les risques. En somme, c’est un mix qui doit être mis en branle, parce que la situation est assez contraignante», déclare Azirar. Maintenant à la question, est-ce qu’il faut une loi de Finances rectificative pour organiser toutes ces actions, l’économiste répond «pourquoi pas ?».
Aziz Diouf / avec Les Inspirations ÉCO