Culture

Silent Distorsion: l’expo hallucinante d’Amine Amharech

Pour son premier solo show à la Loft Art Gallery de Casablanca, l’artiste visuel expose une série de toiles dans lesquelles il met en pratique le procédé informatique du Flow Distorsion. Une expo à voir jusqu’au 10 octobre 2017.

Par Olivier Rachet

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La démarche pour le moins conceptuelle d’Amine Amharech peut, dans un premier temps, dérouter. Passionné de vidéo, l’artiste s’intéresse à la pratique de distorsion du flux optique, qui, selon lui, permet « d’expérimenter le rapport visuel entre une œuvre et un objet, entre l’homme et la réalité qui l’entoure. » La notion de flux optique a été notamment popularisée par le psychologue américain James J. Gibson pour « décrire le stimulus visuel fourni aux animaux qui se déplacent dans le monde », précise Jacques-Antoine Gannat, en introduction du catalogue.

Dessine-moi un flux

La génération Y sera ici en terrain connu. Ces Optical Flow Distorsion qui donnent leur nom à la majeure partie des œuvres exposées sont comme autant d’arrêts sur image, d’hallucinations visuelles suspendues entre deux activités. Il en résulte des jets de couleur qui ne sont pas sans rappeler, parfois, la spontanéité de l’expressionnisme abstrait. Sur des fonds noir ou rouge, différentes palettes de couleur explosent librement, comme autant d’éruptions de lave ou de vortex insaisissables. Des paysages apparaissent parfois, avec tout l’arbitraire inhérent à une telle expérimentation
visuelle. Paysages cosmiques ou montagneux, bassins de nymphéas ou véritables trous noirs indescriptibles.

Amine Amharech insiste sur l’influence de la vidéo dans le travail qui est le sien : « La vidéo est fondamentale dans mon processus de création. Je vois les choses en travelling, en zoom, en plongée, contre-plongée ou en arrêt. La vidéo est pour moi une expérimentation et une évolution dans laquelle je peux à tout moment choisir de cadrer l’espace et le temps ! »

Passeports africains

En-dehors des toiles, l’exposition comporte toute une série de masques composés à partir de couvertures de survie. Définis par l’artiste comme des « sculptures bondage », ces masques rappellent les masques-passeports portés en Afrique centrale avant la colonisation, lesquels permettaient d’identifier la situation sociale du porteur.

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Le plasticien aborde ici, de façon iconoclaste et inattendue, la notion tant rebattue d’identité pour opposer, en un geste non dépourvu de provocation, le Nord et le Sud. Là où les passeports désormais biométriques figent l’individu dans la singularité d’une essence ; les masques, loin d’uniformiser les personnes, déclinent l’identité au pluriel. « Aucune société n’a ignoré le masque, ajoute l’artiste. Celui-ci surgit dès le moment où l’homme accède à l’état de culture. » Ou comme l’écrivait le moins ethnocentriste des poètes français, « Je est un autre », tous les autres.

Quant à la pratique du bondage dont se réclame, non sans humour, Amine Amharech ; elle suggère assez bien le caractère inextricable des liens qui confrontent encore aujourd’hui les pays du Nord à ceux du Sud : « Le bondage, ajoute-t- il, comme pratique, oui, mais comme expression d’un malaise, d’un nouement, et d’une satisfaction aussi! »

O.R.

Exposition Silent Distorsion d’Amine Amharech, du 20 septembre au 10 octobre 2017, à la Loft Art Gallery, 13 rue Al Kaissi, Triangle d’or, Casablanca.


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