Marrakech: Le monde enchanté de Aziz Nadi
Du 8 au 23 juillet courant, le peintre Aziz Nadi présente ses dernières oeuvres à l’Almazar Art Gallery, sise route de l’Ourika, à Marrakech. Un univers inspirant et inspiré que l’artiste explore dans une quête sans cesse renouvelée de visions oniriques qui convoquent tous les sens, répondant en cela à ce qu’affirmait Eugène Fromentin : « L’art de peindre n’est que l’art d’exprimer l’invisible par le visible ».
Il y a, dans la peinture de Aziz Nadi, un sourire d’enfant qui ne s’éteint pas. Une poésie qui murmure l’être. Une danse magique qui respire la grâce. Après s’être employé à trouver des convergences entre “Corps et âme” (2004), avoir épousé spontanément les mouvements intérieurs de “Vagues à l’âme” (2009), voilà que l’artiste s’élance aujourd’hui dans les “Voyages de l’âme”. Autant de titres d’exposition qui placent ces oeuvres dans le prolongement d’une quête d’une grande constance. Mais au coeur de métamorphoses incessantes, où les toiles brassent la lumière du vivant dans le désir de fournir au regard de nouvelles expériences à vivre. Derrière chacune d’elles, s’ouvre l’image d’un horizon d’attente, l’élan d’un seuil à franchir, l’illusion d’un rêve inachevé. Couleurs et formes construisent une langue à part : celle que les Muses parlent et que les âmes pures comprennent. Car des Muses, il en est beaucoup question dans cette exposition où des visages de femmes, d’oiseaux ou d’anges aux regards pénétrants imposent leur présence comme de lumineuses évidences, au milieu de nuits célestes, ou d’aplats fleuris et végétalisés.
Aziz Nadi se réclame de Klimt, Mirò, Saladi. Sans nul doute, on retrouve la trace de leurs influences : l’abstraction habilement colorée de Mirò mixée au sens de la figuration de Klimt, et à l’onirisme débordant de Saladi. Mais l’artiste a trouvé sa langue au milieu de toutes les autres. Une langue qui s’exprime à partir d’une combinaison de techniques variées : acrylique, cernes de vitrail, fusain, pastels, et des collages qui devraient à l’avenir prendre une place plus importante dans le travail plastique. Une langue qui fait oublier les contraintes du dessin pour obliger le regard à saisir l’essence d’une forme appelée à se transformer, et qui fascine par sa plasticité. Comme si chaque forme n’était qu’un prétexte à élargir davantage le champ des imaginaires. La nature qu’évoque Aziz Nadi se recompose ainsi, d’oeuvre en oeuvre, comme un monde enchanté et enchanteur, dont le peintre se saisit pour dire l’univers tel que les elfes et les enfants osent sans peine se l’imaginer, et tel qu’il parle intérieurement et profondément à tous nos sens.
Nul doute que la dimension onirique du travail de l’artiste épouse la fluidité des paysages propres à l’inconscient. Paysages où la lumière travaille les notes de couleurs en déclinaisons musicales riches de sensibilité et qui compose une partition aux vibrations quasi-symphonique. C’est que, parmi les Muses, Euterpe rivalise aussi avec Terpsichore… De fait, en offrant cette expérience intime et plurielle des sens, l’oeuvre du peintre invite l’âme à se connecter avec le monde subtil et foisonnant du dedans, mais en déployant un horizon créatif qui ouvre à l’infini l’aspiration de chacun à vivre poétiquement son rapport au monde.
Lamia Berrada-Berca