Culture

Conférence à Fès: comment la cité islamique a été façonnée?

La Fondation Attijariwafa bank a organisé devant un parterre de plus de 250 intellectuels, hommes d’affaires et acteurs de la société civile, vendredi 13 mai 2016 à Fès, la 19ème conférence de son cycle « Echanger pour mieux comprendre », sous le thème: « Ethique et prospérité: comment les savants, bourgeois et fondateurs ont façonné la cité islamique ».

Cette rencontre organisée en marge du Festival des Musiques Sacrées de Fès, a réuni deux éminents philosophes marocains ayant produit des travaux sur la notion de l’éthique. Il s’agit de Abdou Filali Ansari, Philosophe, auteur de plusieurs ouvrages sur le sécularisme, la démocratisation et la société civile dans les sociétés musulmanes, et de Azelarabe Lahkim Bennani, Professeur de Philosophie à l’Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, qui a publié divers travaux sur l’éthique et les droits de l’homme. La modération a été assurée par Abdellah Tourabi, journaliste et présentateur sur Médi1TV.

Dans un message transmis aux participants de cette rencontre, Mohamed El Kettani, Président du groupe Attijariwafa bank, a déclaré: «Doyenne des villes impériales, Fès est riche de multiples patrimoines, à la fois religieux, culturels et architecturaux. Et cette prospérité de Fès trouve, sans nul doute, son origine dans la culture musulmane qui consacre le travail en tant que valeur sacrée, source de richesse. Cette richesse est perçue comme une grâce de Dieu, une consécration des efforts de l’Homme, voire même, comme une bénédiction divine, en récompense d’une conduite éthique».

Pour définir la notion d’Ethique, le professeur Filali Ansari se réfère à l’économiste et sociologue allemand, Max Weber qui a développé une théorie complète autour de la notion d’éthique protestante. «Le capitalisme serait naît à un moment et un endroit particuliers, grâce à l’éthique. Celle-ci est liée à la transcendance de Dieu et à la consécration du travail, et prône un style de vie ascétique qui favorise l’accumulation du capital. Si l’Islam n’a pas produit ce type de transformation, cela est dû, selon Weber, au militarisme qui a conduit à la propagation du système patrimonial, et au mysticisme intrus». Toujours, selon Weber, l’émergence du soufisme, avec ses attitudes de renoncement, aurait détourné l’Islam et retardé le développement du capitalisme au sein des sociétés musulmanes.

Pour Ernest Geller, ce sont plutôt les disparités entre les villes et les tribus qui ont empêché l’accumulation des richesses. Les villes productrices de richesses suscitant les convoitises des tribus, étaient constamment envahies et pillées. Aucune accumulation de richesses n’était donc possible.

Selon le professeur Lahkim Bennani, l’éthique ne peut progresser que lorsque les contradictions et les dilemmes sont résolus en fonction de l’intérêt général et du respect des préférences personnelles. «Dans les faits, l’éthique individuelle et l’éthique collective sont complémentaires et s’enrichissent mutuellement. Et c’est ce brassage d’expériences qui a fait la grandeur de cités islamiques comme Fès».

Se basant sur la jonction entre éthique collective et éthique individuelle, les oulémas et les notables ont pris conscience de la nécessité de prendre en charge la réalisation d’un certain nombre de biens collectifs, et l’édification d’infrastructures qui font, encore de nos jours, le prestige des cités islamiques comme Fès.


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