Culture

Giacometti, marché de l’art… les confidences de Mehdi Qotbi

Le président de la fondation des musées du Maroc revient pour Le Site info sur le marché de l’art au Maroc et si ses projets à venir. Entretien.

En tant que président de la fondation des musées du Maroc, pourquoi avoir choisi l’exposition Giacometti ?
D’abord, Giacometti est un artiste important qui a marqué l’art du 20e siècle. Je pense que j’ai eu l’opportunité et la chance pour le Maroc de présenter cette exposition aujourd’hui au Musée Mohammed VI. Cette exposition ne peut se faire que dans les grands musées mondiaux. Elle donne ainsi la chance à tous les Marocains de partager avec le monde l’œuvre d’un artiste aussi important. Comme vous le savez, les Marocains passionnés d’art qui veulent voir une exposition hors norme se doivent d’aller demander un visa et de dépasser des obstacles énormes. Je me suis dit qu’il est important d’ouvrir une fenêtre sur le monde à travers une exposition comme celle de Giacometti.

Est-ce que vous avez rencontré des difficultés pour recevoir au Maroc les œuvres de l’artiste suisse Giacometti ?
Cette collection est une collection de prestige dont les assurances sont extrêmement hautes et chères. Prenez juste, par exemple, la sculpture de Giacometti de 50 cm qui a été adjugée à New York à 143 millions de dollars !

Comment la fondation a-t-elle pu régler le paiement des assurances ?
La fondation nationale des musées a bénéficié d’arrangements avec la fondation Giacometti qui a permis et facilité la possibilité d’offrir aux Marocains la présentation d’une telle rétrospective.

Ressentez-vous qu’il existe une certaine sensibilité à l’art qui s’installe chez les Marocains depuis l’ouverture du musée d’art contemporain à Rabat ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis qu’on a inauguré l’exposition de Giacometti, le musée a déjà accueilli plus de 4000 visiteurs ! C’est impressionnant ! Ils viennent de toutes les régions du Maroc.

Pensez-vous que ce sont toutes les classes sociales qui s’intéressent à l’art et surtout à ce nouvel arrivage ou bien juste un public averti qui se dirige vers votre établissement ?
Je peux vous avouer que vendredi dernier, puisque le vendredi est un jour gratuit, toutes les catégories sociales étaient présentes. De ce fait, je peux vous assurer qu’on commence, petit à petit, à réussir le pari de démocratiser l’art et de rendre les musées plus accessibles à tous les Marocains. C’est un point très important et extraordinaire ! Il faut rappeler que depuis l’ouverture du musée plus de 80.000 visiteurs se sont présentés : c’est un chiffre considérable. Les Marocains sont friands de culture, il faut leur donner un programme de qualité dans un endroit de qualité.

Combien de temps va durer l’exposition Giacometti ?
Elle va durer six mois. Elle a commencé en avril et elle se termine le 4 septembre.

Quels sont vos projets pour de prochaines expositions ?
La prochaine exposition rendra hommage à la peinture marocaine et surtout à l’institut national des beaux-arts de Tétouan. Il ne faut pas oublier qu’hormis les collections étrangères, le musée est marocain et fait pour les Marocains.
On a donné carte blanche à cet institut, avec à sa tête un des artistes importants, M. Faouzi Laatiris, qui choisira des artistes, mondialement connus, afin de les exposer dans la prochaine collection. On rend hommage à la peinture marocaine et en même temps on s’ouvre à l’extérieur. D’ailleurs, cela se voit à travers nos collections depuis la création du musée. Actuellement on expose Giacometi, après l’institut national des beaux-arts de Tétouan et enfin on recevra les œuvres des fondateurs de l’art au Maroc. Nous sommes foncièrement tournés vers l’art marocain, tout en restant à la page avec l’art international.

Pourquoi privilégiez-vous la publicité dans la presse écrite plutôt que dans un support télévisuel ?
Pour l’exposition de César un support TV a été réalisé et actuellement on est en train de tourner un autre support pour l’exposition de Giacometti. Ceci est fait grâce à un accord avec la SNRT pour passer des clips sur le musée.

Quels sont les changements que vous espérez apporter avec le musée ?
Nous sommes en train de construire quelque chose de durable. Nous avons signé des accords avec les universités marocaines, avec la SNRT, avec l’ONCF et nous allons continuer avec l’ONCF afin que les personnes issues de quartiers défavorisés puissent bénéficier de la magie du musée et surtout d’une entrée à moitié prix.

Pouvez-vous dire que vous êtes en train de démocratiser l’art au Maroc ?
Effectivement, grâce à des prix attrayants : une entrée à 20 dirhams pour voir Giacometti ne représente pas grand-chose comparée aux prix des musées internationaux de renom. C’est abordable pour tout le monde et le vendredi l’entrée est gratuite.
L’art aujourd’hui, depuis l’inauguration du musée d’art contemporain de Rabat, est présenté avec une très bonne qualité, surtout au niveau de la scénographie. On est aujourd’hui en train d’instaurer le professionnalisme dans ce domaine.

Comment avance la convention sur la muséologie avec la faculté de Rabat ?
Il s’agit de l’université Mohammed V de Rabat. Nous sommes en train de construire l’avenir et l’information, en faisant venir des conservateurs internationaux de renommée mondiale. Ils viennent donner des cours et font profiter de leur expérience les Marocains qui ne sont pas encore à la pointe dans ce domaine-là. Actuellement, il n’y a pas de conservateurs d’art contemporain. Il existe au Maroc des conservateurs dans le domaine de l’ethnologie et de l’archéologie. D’ici moins de cinq ans, le Maroc aura ses premiers conservateurs marocains d’art moderne, formés professionnellement. Un bel avenir attend le marché de l’art et le secteur des musées marocains !

Propos recueillis par Soraya Adny


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