Mouna Hachim: elle nous dit tout sur son nouveau livre
« Chroniques insolites de notre histoire » (Maroc, des origines à 1907), nouveau livre de Mouna Hachim*, vient de paraitre. Entretien avec l’écrivaine marocaine.
Vous venez de sortir un nouveau livre « Chroniques insolites de notre histoire », pouvez-vous nous présenter cet ouvrage. En quoi les histoires seront « insolites » ?
Insolites parce que sortant de l’usage comparativement avec les récits faits notamment par les manuels scolaires, caractérisés par des histoires lisses, chargés de glorification et de mythes et fables érigés au rang d’histoire authentique.
C’est en phase avec ma passion pour l’histoire dans ses dimensions sociales et culturelle et pas seulement, institutionnelle, que j’ai entamé l’écriture de ce livre dont la vocation est d’apporter un autre regard, un peu plus décalé. Allant des origines à 1907, il tente de débroussailler, sans sensationnalisme, les récits officiels en s’arrêtant sur des pages peu développées, comme par exemple la période antéislamique dans un déni de la riche Antiquité et son contact avec le cœur de l’Afrique et avec le monde méditerranéen, la latinité, le christianisme…
D’où vient l’idée de ces thématiques ?
J’ai opté pour une logique aussi bien thématique que chronologique remontant le fil du temps. Ma première chronique s’appelle ainsi : «D’où viennent les Berbères?» et pose sur la table les différentes thèses développées…
Pourquoi ce choix ?
Le choix est motivé par la ligne éditoriale même du livre qui sort des sentiers battus autant par rapport à certaines imageries nationales qu’occidentales. Ce sont des sujets énigmatiques ; des mythes fondateurs quelque peu secoués relatifs par exemple à la conquête arabe et ses violences et népotisme ou à l’Etat idrisside dit, le premier Etat musulman au Maroc (ce qui reste à vérifier…) ; les pages sombres qu’on préfère édulcorer optant pour l’aspect civilisationnel, notamment les violences doctrinales pendant la période almohade ou l’esclavage ou la conquête de l’or du Soudan pendant la période saâdienne…
Les Marocains s’intéressent de plus en plus à leur histoire, comment avez-vous réalisé le livre? Sur quoi vous êtes-vous basée pour pouvoir l’écrire ?
Mes sources documentaires sont strictement livresques et varient selon la nature des thèmes traités, entre ouvrages arabes ou français, classiques ou produits par des chercheurs contemporains… Mon travail de plus de neuf ans sur les noms de famille m’a beaucoup aidée dans le sens de la collecte de précieuses références et informations qui abordent la grande histoire sous un autre prisme, original…
Combien de temps cela vous a pris pour faire ce livre ? Avez-vous eu des difficultés ? Si oui, lesquelles ?
Pour ne rien vous cacher, j’ai travaillé en parallèle sur deux livres que j’ai entamé et terminé en même temps mais dont l’un précédera l’autre, de quelques mois, en terme de publication, parce que les sources documentaires servent à alimenter les deux ouvrages (pour ne pas dire trois !)… Donc quelque chose comme trois ans pour les deux mais en travaillant de manière intensive… Les difficultés n’émanent pas de la recherche ou de l’écriture, elles commencent avec la phase technique et les immenses problèmes liés à l’édition au Maroc. Mais là est un autre débat….
A qui s’adresse ce livre ? Sera-t-il distribué à l’étranger ?
A quiconque s’intéresse à l’histoire du Maroc, sachant que les premières parties sont larges et englobent le Maghreb (d’où la mention Notre histoire). Quant à la distribution, elle est assurée par Sochepress au Maroc en attendant de voir comme gérer l’aspect lié à la distribution à l’international. Je précise également que le livre est auto-édité.
D’après vos recherches, est-ce que le Maroc ne manque cruellement pas de livres sur son histoire ?
Non, les livres sont là, bien que tout travail soit le bienvenu. Ils existent sous toutes les formes : des monographies, des ouvrages biographiques, des relations de voyage… Ce qui manque, c’est la valorisation de ces écrits, leur réimpression, leur traduction, leur analyse et vulgarisation par les médias pour les rendre accessibles au plus grand nombre…
Propos recueillis par Hicham Bennani
*Mouna Hachim est journaliste et écrivaine marocaine. Elle a fait ses études à l’université Hassan II, où elle a obtenu une licence en littérature française et un diplôme d’études approfondies en littérature comparée. Pour la presse, elle a notamment écrit pour L’Economiste. Elle a publié en 2004, « Les Enfants de la Chaouia », une saga familiale dédiée à trois générations d’habitants de Casablanca et de sa région. En 2007, elle a édité le « Dictionnaire des noms de famille du Maroc », un livre réédité et augmenté en 2012 qui restera un ouvrage de référence. La présentation de son dernier livre aura lieu jeudi 28 avril à La Coupole au Parc de la Ligue Arabe.