La Fondation BMCI soutient le lancement du livre d’art « Abbes Saladi, histoires sans fin »
Depuis plus de 20 ans, la BMCI s’engage pour la sauvegarde du patrimoine culturel marocain à travers sa politique de mécénat en faveur de l’édition de livres d’art. Dans la continuité de cette démarche, la Fondation BMCI apporte cette année son soutien à la parution du livre Abbes Saladi- Histoires sans fin, édité par Senso Unico.
Révélé tardivement et disparu jeune, Saladi n’a jamais vraiment intégré le monde de l’art. Taciturne, il est resté mystérieux, tout comme ses dessins. Les auteurs : Jean-Michel BOUQUETON et Brigitte BARBERI DAUM, qui ont bien connu l’homme, nous le font découvrir intimement.
Saladi est devenu populaire au Maroc au point qu’il circule aujourd’hui beaucoup de faux Saladi. Les photos de Christian Lignon, prises dans l’atelier du peintre dès 1978 ou plus tard à la galerie L’Atelier de Pauline de Mazières, où Saladi a régulièrement exposé jusqu’en 1987, assurent l’authenticité des tableaux présentés dans cet ouvrage de référence. Une bibliographie fournie permet de situer l’œuvre dans l’histoire de l’Art marocain du XXe siècle.
“Souvent avant de peindre, je sens mon esprit envahi d’oiseaux ? Je parle avec eux, je les entends dans ma tête… “ Abbes Saladi
“Saladi reste ouvert aux interprétations les plus diverses sans jamais les épuiser. Il est intemporel et universel. “
Jean-Michel Bouqueton
“Dans cette explosion de couleurs acidulées, le noir menace… ou sécurise. L’autorité encadre, emprisonne, mais les parallèles divaguent et la femme rayonne… à moins qu’elle n’arbore sa herse cruelle.“
Brigitte Barberi Daum
“Ils savaient traquer tous deux les couleurs insolites, les lignes de fuite, les existences éloignées qui finissent par se rencontrer, l’inattendu de ce monde et le dialogue entre le quotidien et le fantastique “
Brigitte Barberi Daum & Jean-Michel Bouqueton à propos du lien entre Christian Lignon et Abbes Saladi
A la découverte des “Histoires sans fin“ de Abbes Saladi
Beaucoup d’écrits ont paru depuis la disparition de Saladi, depuis les témoignages amicaux jusqu’aux analyses critiques en passant par les textes poétiques, mais offrant peu à voir de la multiplicité de ses dessins.
Certes ce livre, Histoires sans fin, ne se veut pas exhaustif puisqu’il ne couvre que la période où Christian Lignon, le photographe, et Abbes Saladi, le peintre, se sont côtoyés, essentiellement de 1978 à 1987, par contre pour ces années-là il offre une représentation abondante et fidèle de ses œuvres, comme cela n’avait encore jamais été montré. Puisqu’il s’agissait de laisser parler les images de Saladi, seuls les mots de Jean-Michel Bouqueton ponctuent son parcours. Ils retracent l’évolution du travail de l’artiste, d’un art brut, spontané, issu d’un esprit tourmenté qui a mené à plusieurs reprises l’homme dans les services psychiatriques de l’hôpital, aux œuvres raffinées et légères que la transparence de l’aquarelle illumine. Mais cette chronologie des tableaux, qui n’oublie ni la période naïve des débuts ni les tentatives excentriques de l’artiste cherchant à se renouveler, n’est pas le seul but de ce texte. Depuis une trentaine d’années, depuis la mort de Saladi, surtout, les interprétations les plus diverses ont vu le jour. Souvent érudites, faisant appel à des textes anciens, à la psychanalyse, à la métaphysique, au symbolisme, à l’ésotérisme, elles ont donné toutes sortes de significations aux dessins de Saladi sans jamais les épuiser.
Saladi disait qu’il y avait le devant du tableau qu’on voyait, et l’arrière, qui appartenait à chacun et que chacun pouvait ressentir à sa façon. Aussi ne s’est-il jamais opposé à ces interprétations mais il ne les a jamais non plus validées ni encouragées. Il proposait un dessin qui offrait des “Histoires sans fin“ parmi lesquelles on pouvait se promener au gré de son humeur. Ainsi, pour Jean-Michel Bouqueton, l’art de Saladi consiste à créer des matrices de l’imaginaire dont chacun se nourrit à sa façon sans qu’il y ait une vérité unique et supérieure qui s’impose.
Les mots de Brigitte Barberi Daum associent l’hommage fait au peintre au souvenir du photographe disparu également, sans lequel il serait impossible de plonger aussi précisément dans l’univers d’Abbes. Elle décrit aussi en quelques lignes le foisonnement déconcertant d’une imagination singulière, comme pour mieux la connaître et la retenir, en signifiant sa richesse et sa dualité, puisque l’œuvre de Saladi reflète autant la culture et le quotidien de Marrakech que l’originalité fantasmatique de l’homme. La mise en page, qui laisse le blanc sertir les couleurs, comme pour rappeler l’importance des feuilles dont le peintre était toujours en quête, le choix d’une focalisation sur les détails et quelques portraits intimes permettent de suivre l’artiste à l’ouvrage. L’impression de qualité et le papier de choix offrent un écrin à ce talent unique pour le révéler encore.