« De Sable et de Feu », la nouvelle fresque historique de Souhail Ben Barka
Par Larbi Alaoui
« J’espère que vous ne serez pas déçus! ». C’est la phrase concise, témoignant d’une humilité aussi admirable que son immense talent de réalisateur de Souheil Ben Barka.
C’était au Mégarama,avant la projection en avant-première, à Rabat, mardi 24 septembre dernier, de son nouveau film « De Sable Et de Feu » (le rêve impossible).Et ce, après que le maître de cérémonie de la soirée cinématographique, le journaliste M’hamed Bhiri, avait présenté le metteur en scène et évoqué le synopsis du film, avec sa verve coutumière que les auditeurs de son émission « Inter Matin » sur les ondes de Chaîne Inter connaissent bien et apprécient énormément.
Déçus, monsieur Ben Barka? Que nenni! Nous avions été emportés, envoûtés, ravis et enchantés de voir cette histoire passionnante, des scènes dignes d’un chef d’oeuvre hollywoodien ou d’un péplum grandiose de « Cinecittà », de la Ville éternelle, Rome. Tourné au Maroc, dans les magnifiques studios d’Ouarzazate, aviez-vous révélé, mais également pour certaines scènes extérieures, à Salé (des spectateurs slaouis ont reconnu l’esplanade de la Grande mosquée et la Medersa mérinide), en Italie et en Angleterre, le film a tout pour plaire et fera sûrement date dans la cinémathèque nationale.
Venons-en maintenant à « Mine Ramline wa Nar » (Al holmou al moustahil).Le dernier-né des oeuvres de Souhail Ben Barka retrace l’histoire inouïe et passionnante de Domingo Badia, alias le prince Ali Bey El Abbassi,rôle magistralement interprété par l’Espagnol Rodolfo Sancho. Il y joue le personnage irrésistible d’un espion, conspirateur, astronome, orientaliste et polyglotte hors-pair, ayant vraiment existé,-comme d’ailleurs tous les autres personnages-, et dont Souhail Ben Barka avait eu vent par l’un de ses coproducteurs. Voulant en savoir davantage sur Domingo Badia, le cinéaste s’est alors mis à entreprendre des recherches et à se documenter sur cet Ali Bey El Abbassi, s’étant présenté au sultan Moulay Slimane du Maroc (de 1792 à 1822, année de sa mort) comme étant prince syrien dont le père avait été assassiné par les Ottomans…
En fait, la mission du prétendu « Ali Bey » était de renverser le sultan. Et il avait tellement cru en sa nouvelle identité usurpée que, précurseur d’un « Iznogoud » avant l’heure,-mais plus beau, plus intelligent, plus sypathique et érudit-, il avait eu la ferme intention de devenir « Calife à la place du Calife », en l’occurrence Sultan du Maroc à la place du Sultan Moulay Slimane qu’il avait réussi à séduire par sa prestance et sa culture.
Une petite parenthèse sûrement intéressante. Le journaliste Omar Ouchan a appris à votre serviteur qu’un quartier tangérois porte encore,de nos jours, le nom de « Houmat Ali Bey ». Plus étonnant encore, une statue de lui trônait au milieu de la Grand’place de Béni Makada de la capitale du Détroit. Statue, sûrement érigée par les Espagnols, mal vue par certaines franges islamistes de la population tangéroise et qui a fini par disparaître.
Quant au film, il raconte également la passion amoureuse, dévorante et réciproque de Ali Bey et de Lady Hester, une belle aristocrate anglaise blasée des traditions ancestrales, désuètes et anachroniques,selon elle, de son Angleterre natale, Souhail Ben Barka a confié le rôle à la séduisante et talentueuse actrice italienne, Carolina Crescentini. En tant que Lady Hester ou en convertie d’un islam pur, dur, intolérant et obscurantiste, parvenant à être intronisée comme reine de Palmyre par des tribus bédouines, sous le nom de « Méliki », est aussi époustouflante que rayonnante de beauté et de … cruauté.
Passion, intrigues, trahison, pouvoir, exploitation du discours religieux pour de desseins inavoués, despotisme, conquête de territoires sont quelques uns parmi les nombreux ingrédients qui font du dernier-né de Souheil Ben Barka une fresque historique dont le dénouement est aussi cornélien que tragique. Des thèmes d’une cruelle et triste réalité que le spectateur ne peut occulter et qui font l’objet quotidien de ce qui se trame de par le vaste monde, au Maghreb et au Proche-Orient surtout. Le Maroc n’y échappe pas non plus, comme chaque Marocain ne peut l’ignorer, hélas!
Pour rappel, c’est ce mercredi 2 octobre 2019 que » De Sable Et de Feu » sort en salles sur nos écrans! Gageons que son succès auprès des cinéphiles sera des plus probants et redorera, sans doute, le blason terne et terni du 7ème art national. Un autre « Rêve impossible »? Touchons du bois et bon spectacle!
L.A.