Ils leur promettent le paradis…
Par Jalil Bennani, psychiatre et psychanalyste
Ils sont jeunes, désabusés, exclus, sans espoir. Ils ne trouvent pas leur place dans la société, ils se sentent inutiles. Ils essaient de faire entendre leur voix, mais c’est par la violence, la délinquance, les drogues, qu’ils trouvent le moyen de le faire et d’apaiser leurs angoisses.
Leur enfance est encore là ; ils sont sensibles, suggestibles, révoltés et vulnérables. Ils rencontrent alors des meneurs, des gourous, des hors-la-loi faiseurs de nouvelles lois, de promesses lourdes d’illusions, de risques et de dangers. Ils peuvent aller à l’extrême. À travers des idéalisations trompeuses, ils se voient promus à un avenir meilleur, non pas sur terre, mais dans l’au-delà. Ils sont sous l’emprise de chefs invisibles. Doublement invisibles en n’étant présents que sur les réseaux sociaux et en se référant à une puissance supérieure.
Le Web et les nouvelles techniques de communication, loin d’être utilisés pour le meilleur, comme c’est le cas de ceux qui ne se laissent pas endoctriner, sont mis au service du pire. Le virtuel est vécu comme réel, les déceptions deviennent espoirs, les doutes convictions. Partant d’un état de quasi-inexistence sociale, ils se vivent en héros. Ils sortent de la vie et obéissent aux pulsions de mort de ceux qui les endoctrinent. Ils sont comme sous hypnose. Ils sont persuadés que le mal est sur terre et le bien ailleurs. Ils pensent mourir pour pouvoir vivre !
Que faire pour prévenir ? Informer, éduquer, guérir… C’est une évidence. Mais il faut plus. Tous ces désordres sont les symptômes de nos sociétés. Les causes sont plurielles : sociales, culturelles, économiques, politiques. Mais elles sont aussi les symptômes d’un manque de « vivre-ensemble », entre jeunes et moins jeunes. Les jeunes aiment sortir, on le sait, c’est souvent leur maître-mot. Ils aiment changer. Offrons leur des lieux spécifiques qu’ils réclament tous.
La culture des jeunes est une réalité que beaucoup d’adultes méconnaissent. Les jeunes ont leurs attentes, leurs potentiels, leur créativité. Les écouter, c’est changer soi-même en s’ouvrant au monde de demain et en leur permettant d’épanouir leurs potentiels sans attendre. Il leur faut pour cela des espaces de dialogue, de culture, d’expression artistique. Il est fort à parier que les promesses fallacieuses tomberont d’elles-mêmes.