Economie

Épargne et pouvoir d’achat : comment trouver le juste équilibre ?

Acte psychologiquement lourd au vu des contraintes du monde d’aujourd’hui, l’épargne n’en est pas moins une nécessité. Comment diffuser et ancrer le réflexe de constituer une épargne structurée, même modeste, tout en impliquant le plus grand nombre ? Que reste-t-il à faire ? Nos experts ont la réponse.

Dans un contexte marqué par une inflation galopante, des ressources par définition limitées et des tentations infinies à la consommation, voire à la surconsommation, est-il encore possible de dégager suffisamment d’argent pour épargner ? Si le bon sens voudrait que la réponse soit affirmative en toute circonstance, la réalité est bien plus complexe. Membre du directoire de Crédit du Maroc, Saïd Jabrani soulève d’emblée un «paradoxe».

Sur le marché, l’épargne a son revers ou concurrent immédiat, le crédit. «La plupart de nos parents ont dû attendre des années pour s’offrir une maison ou une voiture, le temps d’épargner. Ils avaient souvent recours à la famille et aux proches pour compléter le financement de leurs projets. Ce n’est plus possible. Aujourd’hui, on prend un crédit en hypothéquant ses revenus futurs», constate-t-il. Pour lui, c’est une raison de plus pour épargner.

«Notre rôle est de conseiller nos clients pour qu’ils comprennent que les crédits sont là pour répondre à des besoins spécifiques, mais que l’épargne est tout aussi importante. C’est une question d’équilibre. Aujourd’hui, je pense que le marché marocain est très bien structuré. Il offre pour chaque besoin des produits spécifiques. Le tout est de trouver la bonne combinaison», explique-t-il.

Pour Bouchra Bennani, directeur des marchés retail bankig à CDM, il existe deux leviers majeurs pour favoriser l’épargne. Le premier est culturel.

«Dans nos familles, à l’école, dans les entreprises et à travers les médias, nous devons promouvoir la culture et le réflexe d’épargner», plaide-t-elle. Le second levier est le digital.

«À Crédit du Maroc, nous l’avons bien compris. Agile, offrant des capacités instantanées de s’informer et d’agir, le canal digital est un outil extraordinaire de démocratisation de l’épargne, notamment auprès des jeunes», ajoute la responsable.

Un autre frein persiste toutefois : la perception selon laquelle l’épargne est réservée aux revenus fixes et relativement élevés. «C’est une idée reçue qu’il faut combattre. Les personnes ayant un revenu faible ou irrégulier sont plus habituées à l’épargne qu’on ne le pense, mais hors circuit bancaire. Qui n’a jamais participé à une tontine au Maroc ?» s’interroge Abdellah Oussayh, directeur Bancassurance, Vie et Partenariats au sein d’AtlantaSanad Assurance. Pour lui, il faut intéresser cette tranche de la population à l’épargne structurée, à travers des offres dédiées, moyennant des versements exceptionnels par exemple, et en démontrant les limites de modèles comme celui de la tontine. Dans ce cas de figure, l’argent n’est jamais fructifié.

«Ne serait-ce que par effet d’inflation, il perd de sa valeur. Or, il existe des produits d’épargne qui, à minima, neutralisent cet effet», explique l’assureur.

Mehdi El Fakir
Économiste et expert-comptable.

«Nous avons une nouvelle génération de Marocains somme toute indifférente à l’épargne. Il faut imaginer des outils pour attirer les jeunes, en martelant les gains possibles et en faisant preuve de pédagogie. L’épargne doit devenir un réflexe dès le premier salaire.»

Abdellah Oussayh
Directeur Bancassurance, Vie et Partenariats à AtlantaSanad.

«L’erreur commune est d’attendre d’avoir un solde positif à la fin du mois pour penser à épargner. Or, l’épargne se fait à l’entrée, dès la réception d’un revenu ou d’un salaire. C’est d’ailleurs le meilleur moyen de freiner la tendance à la surconsommation.»

Cet «indécent» cash en circulation

Pour l’économiste et expert-comptable Mehdi El Fakir, l’épargne est également la solution idoine à un phénomène qu’il qualifie d’indécent : l’excès de circulation du cash au Maroc.

«Nous avons 395 milliards de dirhams en circulation fiduciaire dans le pays, et c’est indéniablement de l’argent dormant, donc un manque à gagner. Je doute fort que cet argent soit producteur de richesse ou qu’il soit rentabilisé», note-t-il.

Pour lui, il est nécessaire d’imaginer des incitations fiscales, sous forme de moratoires par exemple. Il préconise également des efforts visant à démocratiser et à démystifier l’accès aux services financiers.

«Aujourd’hui encore, des gens ont peur de la banque. Elle les impressionne et ça les empêche de franchir la porte d’une agence. C’est un fait, et plus que jamais, nous devons travailler sur cet aspect», observe Saïd Jabrani.

Ilyas Bellarbi / Les Inspirations ÉCO


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