Carburant: la hausse de trop dans les stations-service…
Les automobilistes se sont réveillés, jeudi matin, avec un petit pincement au cœur. Le litre du gasoil, tout comme celui de l’essence, a bondi d’environ 2 DH. D’autres hausses ne sont pas à exclure.
C’est la panique totale au niveau des stations-service, ce jeudi matin. Le sans-plomb a franchi la barre symbolique des 18 DH, à 18,27 DH/l alors que le litre du gasoil coûte, désormais, 16,20 DH. Une énième hausse qui s’explique par le creusement du déséquilibre important entre une demande qui explose et une offre qui a du mal à suivre. Un petit flash-back s’impose pour permettre de mieux appréhender cette donne.
Les Inspirations ÉCO, dans son n°3110 du mardi 31 mai, établissait déjà une corrélation entre l’arrivée du beau temps, la forte demande enregistrée aux États-Unis, dans les pays du Golfe et les pays asiatiques, grands consommateurs de super (du fait de la saison estivale qui pointait son nez), et la dernière augmentation du prix à la pompe du super sans plomb. Lequel avait atteint 16,80 DH/l au 1er juin, lorsqu’il était annoncé une diminution du prix du litre de gasoil d’une cinquantaine de centimes, à un prix moyen de 14,15 DH/l.
Un constat qui reste valable en ce début de saison estivale, connue pour enregistrer une très forte demande sur les carburants. Quant aux raffineries, submergées par la forte demande, elles sont incapables d’honorer leurs engagements vis-à-vis du marché.
Il faut noter que malgré la demande, en constante hausse, ces dernières peinent à réaliser des marges correctes. Lesquelles marges, qui ont repris des couleurs, tournent autour de 140 $/T, contribuant en partie à l’augmentation des prix des produits raffinés.
Pour compliquer davantage la donne, «les investisseurs dans ce secteur rechignent à mettre leurs fonds dans de nouvelles raffineries, estimant que, passée la crise, ils se retrouveront avec des marges faibles. Plutôt donc que de «parier sur un mauvais cheval», ils préfèrent se tourner vers les énergies renouvelables telles que le solaire ou l’éolien», nous expliquait, mercredi, Mostafa Labrak, directeur général d’Energysium.
En effet, on assiste à un afflux des investissements vers les énergies renouvelables, au détriment de nouvelles raffineries. Un changement de paradigme qui s’inspire des accords des différents Cop, entraînant décarbonation obligée vers une neutralité carbone à l’horizon 2050 et poussant les investisseurs à opter pour les énergies du futur (solaire, éolien, hydraulique) et autres biomasses, pour une production d’hydrogène vert.
Ce dernier étant de plus en plus perçu comme un «véritable vecteur d’énergie propre et renouvelable à l’infini», estime l’expert. Selon lui, réinvestir dans le fossile, qui a encore de beaux jours devant lui mais qui est non durable, va entraîner des surtaxes carbones et donc une augmentation des prix.
«Donc, ce n’est pas, à mon avis, un bon choix». Par contre, dit-t-il, «les raffineries qui sont en opération devraient être gardées en bon état pour répondre autant qu’elles peuvent afin de bénéficier de l’augmentation de leurs marges».
Ainsi, les prix devraient grimper davantage jusqu’à frôler les 25 DH/l. «Sur le premier trimestre, la valeur des importations d’énergie représentait pratiquement 6% du PIB, en hausse de 87%, par rapport à la même période de l’an dernier.
Nous nous attendons à ce que les importations d’énergie doublent en prix», nous expliquait, en mai dernier, l’expert Olivier Le Cabellec, décryptant une étude économique du Groupe Crédit Agricole, aux côtés d’Isabelle Job-Bazille, directrice des études économiques du groupe.
Quand on sait qu’au 27 mars, le prix du diesel était de 13,06 DH pour un baril à 118,72 dollars et qu’au 1er avril, il revenait à 14,30 DH pour 107,74 dollars le baril, et qu’à ces niveaux, le scénario de Crédit Agricole annonçait un doublement du prix à l’import, il y a de quoi sérieusement s’inquiéter.
Khadim Mbaye