Benkirane, le crépuscule d’une idole ?
PAR BAHAA TRABELSI, journaliste et écrivaine
Dans un système qui se veut démocratique, tout est de bonne guerre en politique, opinions, programmes, prises de position, alternatives, alliances et mésalliances… Tout, jusqu’à ce que l’on s’aventure sur le terrain dangereux de l’orgueil démesuré et du totalitarisme.
Et Benkirane, animé de je ne sais quelle folie, est tombé dedans, s’octroie à lui et à son parti le PJD toutes les vertus. Supériorité, pouvoir absolu imaginaire, le chef du gouvernement pense être le meilleur et condamne par la même occasion tous les autres supposés quant à eux être une bande de malfaiteurs sans scrupules.
Et aujourd’hui, à la veille des élections législatives, il insulte l’opposition, dénonce un futur hypothétique, où il se positionne en victime d’une conspiration. De son point de vue, le Maroc se divise aujourd’hui en deux clans : ses partisans, qui croient au droit divin de sa politique et les autres. Et de ce fait, On est « pour ou contre lui ».
«Le peuple marocain croit et a cru en nous, le peuple marocain croit en nous». Un acte de foi ? Benkirane se prendrait-il pour un prophète ? Le chef du gouvernement s’adresse au peuple, se déclare victime des ignominies de la vie politique et des manigances des autres partis politiques qu’il traite d’escrocs.
A la fois victime et «leader hégémonique», dans une course à la schizophrénie, Abdelillah Benkirane accuse, menace, se tortille dans tous les sens, convaincu d’être le porte parole incontesté du peuple marocain.
Il accuse le PAM d’user de violence verbale et physique, les médias d’être vendus, bref, dans un délire paranoïaque invraisemblable, le chef du gouvernement, en même temps que de prétendre être le seul à avoir un programme qui tienne la route, crache sur la scène politique, vomit sa hargne qu’il pense non violente, se positionne en sauveur. En résumé, il refuse l’idée de perdre les élections.
Cela ressemble à une descente aux enfers. Mais, surtout, n’oublions pas qu’en démocratie, et au delà d’un plaidoyer à la fois insultant et totalitariste, on ne peut pas quand on est soucieux du devenir de son pays et de ses impératifs à court terme, cumuler en période électorale le poste de chef de gouvernement et chef de parti. Entre les deux, le choix est révélateur des véritables intentions.