Maroc

Maroc: Guéri du Covid-19, un journaliste témoigne

La Covid-19, cela n’arrive pas qu’aux autres. Un journaliste raconte cette « terrible » épreuve. Témoignage de Khadim Mbaye, journaliste aux Inspirations ECO. 

« Le jeudi 3 septembre avait commencé comme n’importe quelle autre journée de travail. Cela n’allait pas durer ! 13h02. J’avais quitté le bureau pour quelques instants, quand mon téléphone sonne. Sur l’écran, s’affiche le nom de la directrice de publication. Je devine que je me verrai confier une info à traiter in extremis ou qu’une précision s’impose sur mon article. À l’autre bout du fil, j’entends: « Allô, Khadim, ca va ?», je bégaie pour en placer une, elle enchaîne sur un ton plutôt inhabituel. «Tu es où ?», demanda-t-elle.

Le cinquième sens que je ne possède pas me dit que c’est sérieux. Une faute grave ? «Je suis juste à côté», ai-je eu le temps de prononcer, redoutant l’annonce à venir. «Ecoute moi bien, s’il te plait. Si tu arrives au bureau, ne monte pas. On te descendra tes affaires. Désolée mais, il faudra rentrer urgemment à la maison et contacter les autorités sanitaires, car ton test PCR est positif.» Le reste de la conversation arrivait, en vagues floues à mes oreilles. «Est-ce que tu te sens bien ?», «Tu n’as ni fièvre ni rien ?»… «Ecoute, je dois appeler un autre collègue aussi. Je suis contrainte de raccrocher, on se rappelle pour la suite. Tu comprends ?». Évidemment que j’avais compris ! J’avais effectivement conscience de la situation que j’allais vivre désormais. En réalité, je n’étais plus maître de mes sens en ce moment là.

Téléphone à la main, je cherchais à contacter quelqu’un pour lui annoncer la mauvaise nouvelle, mais aucun contact ne m’était familier. D’un coup, je pense à ma femme et mon fils, probablement positifs au Covid-19. Un sentiment de culpabilité m’envahit brutalement. Non seulement je n’ai pas pu me protéger, mais j’ai exposé ma famille et mes collègues à ce fichu virus qui fait tressaillir le monde. De retour à la maison, j’appelle un numéro vert. Au bout du fil, une gentille dame me hurle quelques mots en darija avant de me rediriger vers un centre hospitalier à Sidi Moumen. Ce n’était pas la bonne adresse. Barrière de la langue? Il nous a fallu insister sur d’autres numéros sur Internet (Merci Google !) pour se rendre au bon endroit. Il est 18h, nous arrivons finalement à l’hôpital de proximité de Sidi Moumen.

Devant la porte principale, derrière un petit grillage de sécurité, un gardien sans uniforme veille au grain. «Que voulez-vous, Monsieur?», lance-t-il. Je lui réponds sèchement que j’ai la Covid-19. Je ne sais toujours pourquoi j’en voulais à l’homme qui était devant moi et qui, au final, ne faisait que son travail. «Ok, mon ami. Voilà ton ticket. Allez là-bas, toi et ta femme et patientez !» Attendre qui ? Un médecin ? Aucune réponse. Mon interlocuteur était déjà en conversation avec d’autres patients. Nous voici donc au milieu d’une foule immense de «covidiens». Des hommes et des femmes perdus dans un semi-brouhaha. Je ne connais pas leur âge, moins encore leur nom, mais ce n’était pas vraiment important. Tout ce que je voulais à ce moment là, c’était me téléporter au Sénégal, chez moi, ou rencontrer quelqu’un, peu importe son rang pourvu qu’il porte une blousse blanche ! Hélas ! Après une longue attente sous une petite tente de fortune, j’ai finalement compris que mon tour ne viendrait pas. Il fallait donc bousculer les choses.

Comment s’y prendre avec un niveau d’arabe aussi médiocre que le mien ? Par chance, je tombe sur un monsieur plutôt sympathique. «Je suis testé positif à la Covid-19 et on m’a demandé de venir dans cet hôpital », lui ai-je dit. «Nom et prénom, adresse habituelle ?…» Ouf, soulagement ! Une demi-heure plus tard, on nous amène dans un chapiteau pour nous soumettre à deux tests : un électrocardiogramme (ECG) et un test sérologique. Les résultats ne nous ont jamais été communiqués, mais on nous a fait savoir qu’on ne présentait aucun risque grave et qu’on pouvait se confiner à la maison avec le bébé pendant 14 jours. Au-delà de ce délai, nous serions déclarés guéris. C’est tout ? «Oui. C’est tout, monsieur. Vous devrez néanmoins prendre quelques médicaments qu’on va vous prescrire», me dit le médecin. Soulagé, un sentiment d’incompréhension me prend tout de même à la gorge : «Tout ça pour ça ?», me dis-je.

Le lendemain matin, un agent de la délégation de la Santé nous appelle au téléphone pour prendre de nos nouvelles. Il rappellera deux fois de suite mais aucun médecin ne viendra nous voir. C’est plutôt rassurant malgré tout ce qu’on dit. La veille, des collègues m’ont témoigné leur soutien. J’avoue que cela m’a fait beaucoup de bien même si, hormis le stress, je n’avais aucun symptôme grave. C’était eux ma famille. Ma famille biologique se trouve à des milliers de kilomètres de Casablanca. D’ailleurs, ils n’ont été informés de ma maladie qu’après la sortie de mon isolement, lequel je dois le confesser, n’avait rien d’une pénitence, n’eut été la perte du goût et de l’odorat, notamment durant la première semaine de notre mise en quarantaine. On ne sentait même pas les mauvaises odeurs. Aujourd’hui, je perçois les senteurs d’une autre manière. C’est l’une des nombreuses leçons que le coronavirus m’a apprises ».


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