OPINION DU WEB

Et si le PJD perdait les élections?

Par Reda El Ourouba

A la veille des élections législatives du 7 octobre 2016, les partis politiques se précipitent aux portes des électeurs pour vanter leurs candidats et parfois leurs réformes et programmes pour ceux qui en ont préparés. L’approche reste la même dans tous ces cas, et elle peut être résumée ainsi : «Si vous votez pour nous, vous aurez ceci et cela.»

D’autres acteurs de la vie politique, en manque d’idées et à court d’arguments, agissent avec une approche différente. Une approche qui joue sur la peur, et que l’on peut formaliser sous forme de suites d’assertions du genre : « Si vous ne votez pas pour nous, vous risquez ceci et cela. » Certains d’entre eux appartiennent au parti majoritaire. Jouer sur la peur des électeurs en vue d’obtenir leur adhésion est une technique de manipulation politique vieille comme l’est la peur.

Comme le meilleur remède contre la peur a toujours été la raison et l’ouverture, essayons donc d’explorer et d’évaluer le scénario où le PJD sortirait perdant du scrutin du 7 octobre. Qu’arrivera-t-il si le PJD échoue le 7 octobre ? Voici quelques-unes des conséquences possibles :

L’alternance post-2011 : rien n’est plus bénéfique pour une démocratie naissante comme la nôtre que l’alternance politique. Avoir les mêmes ministres et partis au pouvoir n’a jamais apporté de progrès à personne. L’alternance est une chance pour tout peuple de s’ouvrir sur de nouvelles idées et politiques publiques, mais aussi un moyen pour accentuer la concurrence entre acteurs politiques et la centrer sur l’intérêt du citoyen.

Trêve avec les politiques ultra-libérales : tout le monde s’accorde sur le fait que les réformes majeures du PJD étaient toutes des décisions antisociales en majorité dictées par le FMI. Cela va de la libéralisation des prix des carburants jusqu’aux déclarations sur les intentions de l’abandon par l’Etat des secteurs de la santé et de l’éducation, en passant par le gel des emplois dans l’administration publique et l’habitude qu’ont pris les ministres de chercher dans les poches des citoyens l’argent pour boucher les trous [Eau, électricité, pain, autoroutes, ….]. L’échec du PJD forcera le prochain gouvernement à donner plus d’importance aux couches sociales les plus précaires d’entre nous et à innover en matière de financement des réformes.

La fin d’une illusion : depuis 2011, le PJD n’a eu de cesse de prétendre que c’est à lui que revient le mérite de la légendaire stabilité que connaissent le Maroc et son système politique. Ce n’est ni plus ni moins qu’un argument électoraliste vide de tout sens. Une supercherie. Le Maroc était stable, est stable et restera stable. L’échec du PJD rendra visible, à qui veut le voir, que la stabilité du Maroc est dans son ADN et non entre les mains d’un acteur politique quel qu’il soit. L’impact positif d’une telle désillusion sur l’image du Maroc devant ses partenaires, les investisseurs et même ses adversaires sera majeur.

Alignement sur la nouvelle vision : alors que les dossiers chauds de 2011 étaient le printemps arabe et sa déclinaison marocaine le #20Fev, aujourd’hui les priorités ont changé. Le Maroc vise à présent l’Afrique, la clôture définitive du dossier du Sahara marocain, les énergies renouvelables et le nouveau modèle économique marocain. Entamer le futur avec une équipe du passé, c’est semer les graines d’un échec certain. Un nouveau gouvernement à la réputation vierge et non-entachée par les échecs, les scandales et les faits divers devra prendre place, avec comme objectif de réussir ces chantiers majeurs dans 5 ans et pas plus !

L’amélioration du discours politique : si le PJD a su gagner les élections de 2011, c’est en partie grâce au talent de Benkirane et à ses capacités oratoires. Nul ne peut le lui contester. Mais malheureusement, ce talent a connu plusieurs glissements et dérapages, parfois même au sein de nos institutions les plus respectées. Benkirane n’était pas le seul joueur dans cette arène, d’autres ont vite cédé à la tentation populiste. L’emploi d’un langage de rue, la violence verbale, les accusations aux adresses inconnues étaient devenues monnaie courante pendant ce quinquennat. Au-delà de son aspect visant le buzz et susceptible d’amuser certains, ce niveau de discours n’est pas ce que les Marocains attendent de leur dirigeants. Le gouvernement qui succédera à celui de Benkirane prendra certainement ce point au sérieux et saura faire la part des choses entre la nécessaire accessibilité et l’immuable respect dû aux Marocains.

Il n’est pas ici question de dresser une liste exhaustive des bienfaits de la défaite d’un parti ou l’autre, mais bien un rappel à la raison à tous ceux qui, devant leurs échecs et face à la rapide érosion de leur popularité, souhaitent mettre l’électeur, à tort, devant deux choix : « Nous ou l’inconnu ». A ceux-là nous disons : Si vous perdez, le Maroc lui ne perdra jamais.


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