Chantage au roi: Graciet et Laurent rêvent de faire annuler les enregistrements
Dernier épisode de l’affaire Catherine Graciet et Éric Laurent, accusés d’avoir voulu faire chanter le roi: ils se défendent d’être à l’origine du chantage et assurent avoir été piégés par la police française.
Catherine Graciet et Éric Laurent sont accusés d’avoir voulu « extorquer de l’argent au Maroc » en échange de l’abandon d’un livre censé contenir des révélations « gênantes ». Les deux journalistes se défendent (encore et toujours) et contestent avoir été à l’initiative d’un chantage, évoquant une transaction qui s’est nouée librement.
La Cour de cassation a examiné mardi 6 septembre la demande de deux Français mis en examen. D’après eux, il s’agirait d’une « manœuvre déloyale de la police française ». Rappelons que Graciet et Laurent ont été enregistrés à leur insu lors d’entrevues avec l’émissaire de Rabat, l’avocat Hicham Naciri. Deux fois avec le seul Éric Laurent, la troisième fois en présence également de Catherine Graciet. Ils ont été interpellés au sortir de ce dernier entretien, le 27 août 2015, porteurs de 80.000 euros en liquide. Graciet et Laurent ne contestent pas le premier enregistrement, en grande partie inaudible, mais les deux suivants, réalisés alors que l’avocat marocain avait déjà saisi la justice.
Si la loi française permet à des particuliers de rassembler des preuves comme bon leur semble, par exemple par des enregistrements clandestins, elle encadre au contraire strictement les enquêteurs. Or, pour Me Emmanuel Piwnica, qui défend la demande des deux accusés, l’émissaire du Maroc a « fait exactement ce que lui demandaient les enquêteurs français ». Selon lui, Hicham Naciri se serait « transformé en ingénieur du son pour la police, ce qui méconnaît les règles de la procédure pénale ». Une drôle d’idée qui a peu de chances d’aboutir…
Par ailleurs, Me Patrice Spinosi a souligné que, s’il y avait bien eu « concertation » entre les enquêteurs et Hicham Naciri, les enregistrements avaient été réalisés « à l’initiative » de ce dernier, sur son propre téléphone portable, sans assistance extérieure, avec des policiers réduits au rang de « spectateurs ». Me Spinosi relève par ailleurs qu’une annulation de ces enregistrements enverrait aux victimes de chantage le message qu’il vaut mieux « agir dans l’ombre » pour se défendre, plutôt que prévenir la police. L’avocat général a lui rejeté la demande d’annulation: « Monter une souricière pour interpeller un maître chanteur n’est nullement déloyal ».
La décision est maintenant entre les mains de la plus haute juridiction française qui devra se prononcer fin septembre sur cette demande d’annulation, au risque d’affaiblir la procédure si elle était suivie.