Tensions avec l’Arabie Saoudite: pourquoi le Maroc boycotte la presse nationale
Les responsables marocains préfèrent les médias étrangers. La dernière sortie de Nasser Bourita pour balayer d’un revers de main les rumeurs selon lesquelles le Maroc aurait rappelé ses ambassadeurs en Arabie Saoudite et aux Emirats Arabes Unis en est malheureusement une preuve.
Le ministre des Affaires étrangères et de la coopération avait en effet démenti ces allégations par des déclarations à l’agence russe Sputnik au lieu de faire le point à ce sujet auprès des canaux officiels.
C’est le cas également d’un responsable gouvernemental qui a annoncé, il y a quelques jours, que le Maroc a décidé de convoquer son ambassadeur à la pétromonarchie à cause d’une émission diffusée sur la chaîne Al Arabiya au sujet du Sahara marocain. Ce responsable, dont l’identité n’a pas été révélée, avait, de son côté, fait cette annonce à l’Associated press, une agence américaine. Pour s’informer (officiellement) sur l’escalade de la tension entre le Maroc et l’Arabie, les Marocains n’ont ainsi d’’autres choix que de se tourner vers les médias étrangers qui, pourtant, ne devraient pas avoir l’exclusivité.
Après l’éclatement de cette affaire, plusieurs supports marocains, dont Le Site info, ont contacté le ministère des Affaires étrangères pour obtenir des réponses, sauf que l’institution s’est vautrée dans le silence et n’a ni confirmé ni démenti les propos relayés ailleurs.
A ce propos, le spécialiste des relations internationales Jamal Al Mouhafid a indiqué à Hespress que les responsables marocains se tournent vers les médias étrangers afin de garantir un rayonnement plus appuyé aux positions du Royaume. Il a toutefois qualifié cette stratégie d’«incorrecte» vu que les affaires nationales, selon lui, concernent d’abord l’opinion publique marocaine
«Tout pays doit puiser sa force de ses médias et de son opinion publique et non pas de l’étranger. Les pays démocratiques s’adressent à leurs citoyens via leurs médias nationaux. Ne nous voilons pas la face», s’est-il insurgé.
Et d’ajouter : «On a pourtant applaudi les récentes tentatives des responsables marocains de s’ouvrir aux médias nationaux alors que les annonces officielles, dans les années 80, se faisaient uniquement via la MAP. Maintenant, on espère réellement que cette erreur du ministère ne se répète plus. Le problème aujourd’hui, c’est que les responsables éprouvent toujours une certaine méfiance envers les journalistes marocains. Et cette méfiance n’est pas bénéfique pour la transition démocratique à laquelle le Maroc aspire. En plus, le modèle économique tant rêvé par le Royaume ne peut être réalisé sans garantir aux Marocains le droit à l’information».
Il a jugé, pour conclure, que le silence du ministère au sujet de la crise Maroc-Arabie Saoudite est totalement insignifiant, précisant que l’exploitation politique de ce genre d’affaire par les ennemis de la nation et la diffusion de rumeurs à ce sujet sont dues à ce flou entretenu par le département de Nasser Bourita.
Noura Mounib